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Planète SF - Page 3

  • Les vents du destin (La trilogie des vents, tome 1), de Mercedes Lackey

    la-trilogie-des-vents,-tome-1--les-vents-du-destin-115406-264-432.jpgRésuméElspeth, héritière du trône de Valdemar, cherche désespérément un mage capable de s’opposer aux puissances noires qui menacent les frontières de son pays. Elle se rend au coeur des Terres Extérieures, et y découvre un univers vieux de plusieurs millénaires, jadis contaminé par une catastrophe surnaturelle. Des races étranges, comme celle des Taleydras, y luttent contre des monstres assoiffés de sang et de pouvoir, avides de s’emparer de toute magie pour renforcer la leur. Entraînée dans cette guerre, Elspeth va devoir trouver sa propre voie… et découvrir la vraie nature de Besoin, l’épée magique.

     

    Mon avis : Mercedes Lackey a écrit plus de 25 tomes dans l'univers fantasy des Hérauts de Valdemar. Autant dire qu'à ce stade, ça ressemble à l'abattage. La trilogie des Vents, dont voici le premier tome, se situe presque à la fin du cycle des Hérauts de Valdemar.

    J'avais déjà  lu (et pas chroniqué... pas bieeeeeen) au moins une trilogie dans ce cycle. C'était une fantasy légère et sans prise de tête. Comme j'avais besoin de la même chose il y a quelques temps, j'ai remis le couvert avec ce tome 1 issu d'une OP Bragelonne.

    N'ayant pas lu le cycle dans l'ordre, j'ai dû laisser de côté quelques références que je ne comprenais pas. Ceci passé, le récit à deux voix, celle d'Elspeth d'une part et celle de Ventnoir le Taleydras d'autre part, m'a emmené à la fin de l'histoire sans encombre. 

    Sans encombre, mais pas sans ennui. Car, hélas, les nombreux et interminables atermoiements d'Elspeth, et parfois de Ventnoir, gâchent le plaisir. Pour mener un personnage vers d'un point A à un point B, les 380 pages du livre ne nous épargnent aucune hésitation, si infime fut-elle, dans le cheminement intérieur des personnages. C'est bien dommage, puisque par ailleurs le croisement des destins des deux protagonistes est plutôt bien préparé et leur *alerte spoiler* rencontre finale, crédible et sans un effet de manche qui gâcherait la suspension d'incrédulité.

    Le récit permet de découvrir graduellement un univers un peu plus complexe et intéressant qu'il n'y paraît au premier abord, et tente d'expliciter les diverses voies empruntées par la magie et les magiciens. Rien de révolutionnaire là dedans, on est loin de certains systèmes de magie impeccablement construits, du genre hard-fantasy comme celui de Brandon Sanderson dans Fils-des-Brumes.

    L'exposition de l'histoire fondatrice du monde de Valdemar et des mythes qui en découlent, le temps passant, ainsi que le développement complexe et relativement varié des diverses peuplades, permettent de maintenir l'attention du lecteur. L'écriture est fluide et les personnages assez vite attachants (même les griffons !).

    On peut, si on n'a rien d'autre à se mettre sous la dent, ou si on est fatigué, passer le temps avec ce roman sans avoir l'impression de se cogner le crâne contre les murs. Ce qui est déjà très bien.

     

    Edition : Milady, 2012

    Genre : fantasy, héroïc fantasy

  • Black Panther, de Ryan Coogler

    0883250.jpgSynopsis : Après les événements qui se sont déroulés dans Captain America : Civil War, T’Challa revient chez lui prendre sa place sur le trône du Wakanda, une nation africaine technologiquement très avancée. Mais lorsqu’un vieil ennemi resurgit, le courage de T’Challa est mis à rude épreuve, aussi bien en tant que souverain qu’en tant que Black Panther. Il se retrouve entraîné dans un conflit qui menace non seulement le destin du Wakanda, mais celui du monde entier…

     

    Mon avisBlack Panther est un film dans lequel deux personnages blancs, interprétés par les excellents comédiens britanniques Martin Freeman et Andy Serkis, jouent les faire-valoir. Tous les autres personnages sont noirs, et occupent le devant de la scène. Avec talent, et souvent avec charisme. Cette évidence passée, qui a rendu célèbre ce film dans le monde entier, nous pouvons nous attaquer à la qualité intrinsèque du film.

    D'abord, il y a plus de dialogues que de baston : pour un Marvel, c'est une bonne nouvelle. La baston, c'est sympa, mais on apprécie qu'elle n'occupe pas tout le temps de cerveau disponible.

    Ensuite, c'est un film au premier degré. Mine de rien, après Thor Ragnarok et Les gardiens de la galaxie (vol. 1 et 2), c'est un changement. Il est particulièrement appréciable dans le contexte de cette histoire qui veut nous y faire croire - et y réussi sommes toutes pas trop mal. Justement, le fait d'avoir mis le paquet sur les dialogues plutôt que sur le nombre et la longueur des scènes de baston permet de faciliter la suspension d'incrédulité et rapprocher le spectateur des personnages.

    Surtout, il n'y a pas seulement des noirs dans ce film, il y a surtout des noirs qui jouent des rôles d'africains. Ce fait est d'une importance fondamentale. La représentation de l'Afrique et des africains en position dominante n'était pas rare dans le cinéma occidental : elle était inexistante. Jusqu'à Black Panther. J'y suis particulièrement sensible, et ce film fait précisément ce qui peut marquer les esprits : associer les africains avec les concepts de richesse, de développement, d'influence, de technologies de pointe... et de stabilité politique légitime. Des africains en boubou et tenues bariolées, appartenant à des tribus, qui dansent et exubèrent (oui, je sais, néologisme) tel que les occidentaux se les représentent - à tort ou à raison. Mais des africains puissants, heureux, progressistes et conquérants, qui ont des tas de choses à dire et à enseigner à leurs homologues des pays occidentaux. En cela, Black panther un vrai bol d'air frais. En cela, il me fait un peu penser au roman La terre bleue de nos souvenirs d'Alastair Reynolds.

    Le Wakanda est trop beau pour faire vrai, les images de synthèse le constituant sont trop... parfaites, mais il fait envie. J'y émigrerai très volontiers, toute blanche et occidentale que je suis. Le Wakanda est égalitaire malgré son système monarchique, et les femmes occupent des postes de pouvoir, dont ceux de la garde royale. Ces guerrières au crâne rasé sont les plus belles femmes que j'aie vu depuis longtemps ; altières, elles s'imposent avec une autorité naturelle : elles inspirent l'envie et le respect. Elles resteront longtemps gravées dans ma mémoire.

    Bien entendu, ce film a des défauts. Le plus flagrant étant la faiblesse du scénario : on connait l'issue de l’histoire avant même d'aller en salle ; il suffit d'avoir vu la bande-annonce pour la deviner. Il fallait bien que la patte hollywoodienne se fasse sentir... Mais, mais, mais : la némésis de T'Challa, Killmonger, est un personnage très réussi. C'est un méchant compliqué, que l'on comprend, et qu'on ne peut pas détester, puisqu'il oblige le Wakanda et son roi à faire face à leurs propres démons. Un vrai bon méchant.

    Toutes les questions essentielles de l'histoire africaine sont évoquées, des colonisations à l'esclavage. Le positionnement suprématiste des nations occidentales obligent le Wakanda à se cacher et, de ce fait, à refuser aux peuples qui l'entoure l'aide qu'il pourrait leur apporter. Peu manichéen, le film fait la part belle aux zones grises, parfois aux zones d'ombre, et même aux zones de non-dit - ou du moins, de non-explicité. Ce qui, pour un film de ce calibre (on parle quand même du MCU - le Marvel Cinematic universe), relève de l'exploit !

     

    Africanisme flamboyant (donc, pas franchement nuancé, mais on s'en contente), acteurs crédibles et charismatiques, histoire porteuse d'espoir : le retentissant succès international de Black Panther est une bonne nouvelle. Un succès mérité, un film que je reverrai avec beaucoup de plaisir.

     

  • Justice League, de Zack Snyder

    Justice-League-pourquoi-Warner-DC-ne-doit-pas-se-planter.jpgSynopsis : Après avoir retrouvé foi en l'humanité, Bruce Wayne, inspiré par l'altruisme de Superman, sollicite l'aide de sa nouvelle alliée, Diana Prince, pour affronter un ennemi plus redoutable que jamais. Ensemble, Batman et Wonder Woman ne tardent pas à recruter une équipe de méta-humains pour faire face à cette menace inédite. Pourtant, malgré la force que représente cette ligue de héros sans précédent – Batman, Wonder Woman, Aquaman, Cyborg et Flash –, il est peut-être déjà trop tard pour sauver la planète d'une attaque apocalyptique…

     

    Mon avis :  Aaah. Justice League. Un film DC Comics qui fait du Marvel. Comme me le disait récemment Tom, mon jeune collègue (par extension, oui, je suis vieille), le problème c'est que le film a été commencé par un réalisateur de DC Comics (Zack Snyder) et a été fini par un réalisateur de Marvel (Joss Whedon). Snyder a abandonné suite à un drame personnel, et Whedon s'est occupé de la fin du tournage, du montage et de la post-production. Les deux réalisateurs sont plutôt bons dans leurs parties, si on aime les films de superhéros.

    Mais ça ne marche pas. Les films DC Comics font dans le premier degré, ils sont sombres, rarement comiques. Un parti pris qui plaît ou non, mais là n'est pas mon propos. C'est que vouloir à tout prix intégrer la légèreté, le second degré et la bouffonnerie issus des Marvel dans ce monde de demi-teintes grises constitue une erreur. Les interventions clownesques de Flash dans une histoire aux accents de tragédie grecque (ou atlante, comme on veut) sont des plus déplacées. J'en ai réellement été gênée durant la projection.

    Tout n'est pourtant pas à jeter : la prestation de Gal Gadot en Diana Prince/Wonderwoman me garde sous son charme, cette femme a du charisme ; je continue à aimer Ben Affleck en Bruce Wayne/Batman, que je trouve particulièrement savoureux - Dieu sait pourtant que son personnage n'est guère aimable. J'ai apprécié les introductions des personnages d'Aquaman et Cyborg. La relation de Cyborg ave son père est fort bien amenée, une belle intimité père-fils est établie. Pour ce qui est d'Aquaman... Grosso modo, mon analyse se résume à  : « Raaah  ! Jason Momoa / Khal Drogo à demi nu, plein de tatouages et de longs cheveux sauvages... Raaaaah ! Un bain d'eau glacée, viiiiiite ! ». Ce qui ne constitue en rien une réflexion constructive, admettons-le.

    La réplique la plus drôle du film est hélas déflorée par la bande annonce : Flash à Bruce Wayne " C'est quoi ton super-pouvoir, au fait ?" Bruce Wayne : "Je suis riche."

    Le récit finit par être plat : un super méchant qui va détruire le monde, les super héros qui se liguent pour le contrer, un déjà vu qui commence à peser. Bien entendu, la question du rôle de Superman là dedans apporte un peu de piment, vu qu'il est mort, tout de même. Du moins au départ. M'enfin, une fois cet arc narratif résolu, on s'ennuie. On passe un moment à regarder de beaux effets spéciaux, de beaux muscles (pour celleux qui apprécient), un ou deux passages où les personnages nous touchent, et puis, on attend la fin.

    Donc, hélas, bien que je n'ai pas boudé mon plaisir durant la projection, je crains que Justice league ne laisse rien de très intéressant dans ma mémoire... Mais j'attends le film d'Aquaman avec un peu d'impatience (pour des raisons que tous ceux qui ont lu cette chronique comprendront sans peine).

     

  • Valérian et la cité des mille planètes, de Luc Besson

    395704.jpgGenre : space opera coloré

     

    Synopsis : Au 28ème siècle, Valérian et Laureline forment une équipe d'agents spatio-temporels chargés de maintenir l'ordre dans les territoires humains. Mandaté par le Ministre de la Défense, le duo part en mission sur l’extraordinaire cité intergalactique Alpha - une métropole en constante expansion où des espèces venues de l'univers tout entier ont convergé au fil des siècles pour partager leurs connaissances, leur savoir-faire et leur culture. Un mystère se cache au cœur d'Alpha, une force obscure qui menace l'existence paisible de la Cité des Mille Planètes. Valérian et Laureline vont devoir engager une course contre la montre pour identifier la terrible menace et sauvegarder non seulement Alpha, mais l'avenir de l'univers. 

     

    Mon avis : Luc Besson sait réaliser des films. Les imaginer, les tourner, les monter. Et en plus, il adore, en SF, si on s'en réfère à ses deux space-operas (Le Cinquième Élément et Valérian), les univers très colorés. Donc, moi, j'aime quand Luc Besson fait un space-opera.

    Évidemment, c'est du Besson. Donc on a une réalisation virtuose, franchement réjouissante, sur une histoire un peu creuse mais enlevée, directement inspirée de deux des albums des créateurs de la BD éponyme, et dont les personnages font preuve d'une maturité qui s'élève au niveau d'un lycéen de seconde. Environ.

    La scène d'exposition est assez drôle, avec l'ajout successif des peuplades à l'ISS et sa transformation en cité des mille planètes, avec quelques clins d’œils sympathiques à des références bessoniennes ou extérieures. Mais ensuite, il faut passer la trop longue scène de destruction de la planète Mül : les très grandes filles longilignes qui dansent en s'étirant et souriant bêtement pendant 20 minutes, ça me gave. On entre ensuite dans le vif du sujet : la mission confiée à Valérian et Laureline, qui permet de passer au rythme du film d'action.

    Dane DeHaan et Cara Delevingne incarnent les rôles-titres, de façon aussi convaincante que possible, vu la faible complexité des personnages. J'ai vu ici et là des critiques virulentes contre le côté falot et pusillanime de Dane DeHaan, mais pour le coup, je trouve que c'est justement là ce qui est intéressant : le film porte son nom, mais il ne porte pas seul le film. Et d'ailleurs, le personnage original de la BD est sacrément bêta. Pas idiot, mais immature. Donc, Valérian par Dane DeHaan, c'est pas mal du tout, je trouve. Il a de jolis yeux et un beau sourire. Il est amusant. Pour une fois, le héros est mignon et compétent mais inconséquent. Il ne brille pas par son épaisseur. Ce n'est pas grave, ça arrive tout le temps au cinéma, d'avoir de tels personnages ; c'est juste qu'en général, il s'agit des personnages secondaires... ou des personnages féminins principaux.

    Le film est donc au moins autant porté, on l'aura compris, par Laureline / Cara Delevingne. Une fille. Jeune, sexy, engagée, avec un caractère affirmé et de la suite dans les idées. Vous pouvez remplacer par « un mec jeune, avec de belles tablettes de chocolat et des pectoraux, engagé, avec un caractère affirmé et de la suite dans les idées », et vous avez un pitch classique des films de SF/action/aventures. Rien de nouveau sous le soleil, donc, si ce n'est qu'on a changé le sexe du protagoniste. Laureline est un peu plus intéressante que son partenaire.

    Je trouve donc très dommageable qu'à la fin du film, *alerte spoiler !* Laureline succombe au charme de Valérian. Comprenez-moi : on sait depuis le début du film que Valérian convoite sa partenaire. Il tient le rôle classique du dragueur impénitent, ce qui agace Laureline. La transformer en poupée presque romantique à la fin du film est donc maladroit et absolument pas crédible. Il aurait été plus logique soit qu'elle le renvoie gentiment dans ses vingt-deux, en attendant qu'il évolue (dans les prochains films ?), soit qu'elle consente avec plus d'amusement et de distance - et non qu'elle succombe comme une potiche.

    Le personnage joué par Rihanna, plein de promesses lors de la scène d'introduction, est maladroitement approfondi par le scénario afin que le spectateur s'y attache en un temps record. Cela ne marche pas du tout. Dommage pour elle.

    Cela posé, parlons de ce qui est pleinement réussi dans le film : une réalisation échevelée, un univers visuel ultra coloré, des scènes d'action étourdissantes - au sens propre. Il fallait le voir au cinéma pour en profiter. Peut-être même en 3D, mais en 2D, ça passait très bien. Je ne parle pas du scénario, qui contient des trous plutôt visibles, mais bien de ce que le spectateur voit. Et ça envoie. C'était très beau, très enthousiasmant, et malheureusement, assez vain. Dommage que le film manque autant d'épaisseur, il est passé à ça de devenir culte.

    Valérian et la cité des mille planètes est ce qu'il annonce être, un blockbuster divertissant : on peut être déçu, mais il n'y a pas vraiment de promesses non tenues. J'ai fait avec, et j'ai apprécié.

     

    Cette chronique aurait dû rentrer dans le Summer Star Wars de Lhisbei et M. Lhisbei, mais j'ai trois siècles de retard. Et trois millénaires d'avance pour l'épisode de l'été prochain...

     

  • Mort aux grands, de Pierre Léauté

    images.jpgGenre : uchronie ubuesque

     

    Résumé : 1919. La Première Guerre mondiale s’achève enfin et la France doit reconnaître sa défaite face à l’Allemagne. Humiliée, ruinée, la population vit désormais sous le joug du grand Kaiser. Des cendres de la défaite va cependant s’élever un homme qui ne se résigne pas : le soldat Augustin Petit !

    Lui seul a compris les raisons de la déroute. Lui seul en connaît les responsables. Lui seul a le courage de les désigner : les grands ! Voici poindre la terrible revanche du plus patriote des rase-moquettes. Vive les petits bruns !

     

    Mon avis : « Ah, vous avez fait des études d'histoire ? Alors, vous verrez, ça devrait vous plaire.... » : tels furent les mots prononcés par l'auteur à mon intention alors qu'aux Intergalactiques 2016 à Lyon je rendais visite au stand de son éditeur, Le Peuple de Mü. Pour y voir Emmanuel Quentin - mais on le sait, la vie est faite de rencontres.

    Donc, un an plus tard, je tire Mort aux grands de ma PAL et je le lis. Un court roman, d'aucuns diraient une novella, qui raconte l'histoire d'Augustin Petit, poilu patriote et revanchard. Car dans ce récit, la France a perdu la première guerre mondiale face à l'Allemagne. Augustin Petit refuse cette défaite, cherche et trouve les responsables de cette débâcle : les grands.

    Voici donc un roman féroce et drôle, et qui m'a paru fort salutaire. Plutôt pamphlet politique et social que roman, d'ailleurs, il dénonce la bêtise humaine et les ravages auxquels l'ignorance et la haine peuvent mener. Augustin Petit est le Hitler à la française, qui part en guerre contre les grands comme l'autre était parti en guerre contre les juifs. C'est évident, mais que c'est bien construit ! Pertinent, très documenté (Pierre Léauté est prof, dans la-vraie-vie-qui-fait-gagner-des-sous : ça aide), malin : on se prend un camouflet. Et on est content de l'avoir reçu !

    Par ailleurs, Mort aux grands est écrit dans un très joli français, volontairement ampoulé pour la mise en contexte, qui se révèle un vrai plaisir de lecture.

    Je te recommande donc ce livre, ami lecteur, pour sa pertinence et sa drôlerie, qui nous rappelle combien il est important pour les peuples d'avoir de la mémoire et un minimum de culture générale. Sinon, ils se retrouvent avec des pays dirigés par des Augustin Petit - ou des milliardaires à mèche.

     

    Edition : Mü éditions,  2015

  • Où s'imposent les silences, d'Emmanuel Quentin

    CVT_Ou-simposent-les-silences_2681.jpg

    Genre : gymkhana entre les mondes

     

    Résumé : D’où que vous veniez, quelle que soit votre Terre d’origine, êtes-vous sûr de vouloir lire les lignes qui suivent ? De vous entendre résumer une histoire en quelques mots sous prétexte qu’ils vous éclaireraient sur son contenu ? Voulez-vous vraiment savoir ce que recèlent ces pages ? Sachez donc que vous allez partir à la rencontre d’un étudiant confronté à un tableau de la Renaissance pour le moins anachronique, d’un flic enquêtant sur un cadavre improbable, et d’une femme amnésique se réveillant dans un champ désolé. Trois personnes rattrapées par le déséquilibre des mondes. Si votre Loi vous y autorise, ouvrez ce livre, avant que ne s’imposent les silences.

     

    Mon avis : L'auteur m'avait prévenue : « Blop, tu devrais aimer celui-ci plus que le précédent ! ». Et il avait raison. Là où le genre fantastique associé au thriller ne m'attirait guère dans Dormeurs, la science-fiction à suspens d'Où s'imposent les silences me plaît.

     Ce roman au si beau titre et à la couverture splendide (de Pascal Casolari) se lit vite. Trop vite, en fait.

    L'auteur m'avait aussi dit : « tu vas voir, j'ai travaillé le personnage féminin, tu m'en diras des nouvelles ! ». Effectivement, LA femme du récit (oui, parce qu'en fait, il n'y en a guère d'autre... Pourquoi tous les autres personnages principaux sont-ils des hommes ? Hein, Manu, pourquoi ? Je sais, tu vas dire que je ne suis jamais contente...), lorsqu'on comprend ce qu'elle est et d'où elle vient, est un personnage intéressant, résilient et redoutable. Et encore ne fait-on que deviner les traits de sa personnalité en creux : il y a beaucoup plus derrière que ce que l'auteur en dit.

    La flopée de personnages principaux (c'est un vrai roman choral) est réussie, ils sont attachants, mais leur contextualisation est trop brève -  à l'exception de Dimitri - pour les voir véritablement évoluer durant le récit. On a envie d'en savoir plus, parce que le récit de leurs mésaventures est prenant et addictif. En fait, je crois que ce roman m'a frustrée parce qu'il m'a plu. Oui, ma vie de lectrice est compliquée...

    Mais sinon, quid de l'histoire ? Matthias, Alex Jovic et LA femme : trois personnages initiaux pour trois récits distincts se superposent, dans deux univers différents. Puis trois. Puis quatre. La force d'une narration bien menée, c'est de ne pas perdre ses lecteurs dans une construction aussi éclatée. Ici, pas de problème : on rentre dans le livre, on accompagne les personnages, et on n'a pas la moindre envie de les lâcher. Page-turner accompli, voici un roman qui assume sa fonction divertissante tout en distillant quelques problématiques contemporaines.

    L'univers "normal" de Matthias et Alex se déroule sur une terre, qui dans moins de 20 ans, est dévastée par une épidémie. LA femme se retrouve dans un univers immobile, où elle est véritablement engluée. Et puis, il y a les autres, Dimitri en tête, qui proviennent d'une terre alternative victime des menées conquérantes de la « République » de Falmur, qui asservit politiquement et psychologiquement les peuples conquis, afin de faire prévaloir la puissance et l'absolue dictature de la Loi (falmurienne). La Loi a toujours raison, et il est bon de le faire savoir au monde entier. Et mêmes aux autres (mondes), tant qu'à faire.

    Les silences dont il est question dans ce titre poétique sont ceux imposés par la Loi, qui ne tolère pas d'autres langues, pas d'autres voix que la sienne. Bien que le contexte politique ne soit pas suffisamment développé à mon goût, le roman propose des pistes qui tournent autour de la défaite de la démocratie, et du virage réactionnaire et obscurantiste qu'elle prend en période de crise des valeurs. Un rappel utile en ces temps troublés, où les libertés fondamentales se désagrègent peu à peu, et ce, sous notre nez.

    Le portrait d'un violeur est tout aussi impressionnant et pertinent quant à l'intégration inconsciente de la culture du viol par les individus. Une thématique anti-sexiste qui ne pouvait que me plaire.

    Je peux par ailleurs évoquer les différences de tonalité d'écriture qui caractérisent le personnage en scène dans le chapitre, et qui rendent le récit d'autant plus vivant.

    Ces aspects, et bien d'autres encore, sont abordés dans Où s'imposent les silences. Ils témoignent d'une belle largesse de spectre. Tout cela est d'autant pus frustrant que le roman est court. J'en suis à rêver qu'Emmanuel Quentin produise des romans-fleuve à la Brandon Sanderson, imaginez un peu !

     

    Merci donc, Emmanuel, pour ce chouette roman. J'ai beaucoup apprécié ce moment de lecture. Je ne l'ai d'ailleurs pas sitôt terminé qu'il est passé de l'autre côté du lit, sur la table de chevet de M. Blop. Il m'en dira des nouvelles...

     

    édition : Le Peuple de Mü, 2017

  • L'alliance (La Saga Vorkosigan, tome 18), de Lois McMaster Bujold

    71V4t6nBDhL.jpgGenre : « Ivan, espèce de crétin ! »

     

    Résumé : Lorsqu'il est affecté à la protection discrète et rapprochée d'une jeune représentante du beau sexe sous l'un des dômes de Komarr, le capitaine Ivan Xav Vorpatril, plus connu sous le nom de Cousin Ivan, s'applique à sa tâche avec zèle, quoique sans la moindre discrétion. Il se trouve qu'en réalité, fille d'une des plus puissantes familles de l'Ensemble de Jackson, Nanja Brindis fuit les tueurs qui ont décimé son clan. Mais Komarr n'est pas sûr, et Ivan parvient vite à la conclusion qu'il leur faut gagner Vorbarr Sultana, la capitale de l'empire, pour mettre à l'abri la jeune femme dont la vie ne tient qu'à un fil.
    Un fil... ou un anneau ?  

     

    Mon avis : je ne pouvais évidemment pas laisser passer un Summer Star Wars sans parler d'une de mes séries chouchoutes de space opera, la Saga Vorkosigan. Surtout quand j'ai lu de nouveaux tomes dans l'année.

    Voici donc, pour la première fois, un roman réservé à Ivan Vorpatril, le crétin magnifique, cousin de Miles Vorkosigan. Ivan est un personnage fétiche de la saga, parce qu'il incarne sans aucun doute tout ce que Miles aurait dû être si sa mère n'avait pas été empoisonnée à la soltoxine durant sa grossesse. Au fur et à mesure des 17 précédents tomes de la saga, on apprend à découvrir Ivan. Ivan est intelligent, mais il dissimule son intelligence sous une épaisse couche de fainéantise - qu'il ne cache, elle,  surtout pas. Ivan est léger, ce qui le fait paraître superficiel. Ivan n'est jamais réellement ce qu'il paraît être, même aux yeux de Miles. L'incipit reprend l'exclamation la plus courante qu'on trouve dans la bouche de Miles quand il parle à son cousin - plus exactement, quand il vocifère à son intention. Le gimmick est tel qu'il en est devenu une private joke entre un chauffagiste adepte de SF et moi, au boulot, c'est vous dire. Mais, pardon, je m'égare.

    Avoir tout un tome pour Ivan Vorpatril est donc, de fait, une très bonne nouvelle. Parce que l'avantage avec lui, c'est qu'il ne nous déçoit jamais : il fait gaffe sur bévue, tout en maintenant un cap logique et bien plus subtil qu'on pourrait le croire à ses actions. On rit, beaucoup pour ma part. On est surpris, aussi, et c'est sans doute l'une des grandes qualités du personnage : lorsque sa nature réelle se dévoile, on découvre chez lui des motivations profondes insoupçonnées.

    Ce roman permet également au lecteur de voir Ivan Vorpatril déployer sa connaissance infinie - on peut, à ce point, parler d'érudition -  de la société barrayarane en général, et de la caste Vor en particulier (les Vor étant les nobles de la planète Barrayar). Nous découvrons à quel point les jeux de pouvoir n'ont aucun secret pour lui, et que la raison de l'acquisition de ces savoirs a été une des plus cruelles leçons de sa vie. Sa lucidité sur sa condition est parfois effarante, surtout comparée à l'image qu'il donne de lui. Le roman révèle également à quel point les qualités d'Ivan Vorpatril sont extrêmement utiles, voire nécessaires, dans le cadre de son obscur emploi de secrétaire particulier d'un haut-gradé de l'armée. Et finalement, on comprend les raisons pour lesquelles il se réfugie dans le rôle d'un personnage inoffensif et passe-partout.

    Bien entendu, les clés du personnage Ivan sont dévoilées au cours d'un récit à suspens, mêlant humour, action et coups de théâtre, ainsi que Loïs McMaster Bujold sait fort bien le faire. On se doute évidemment comment se terminera l'histoire dès son début, mais il n'en reste pas moins que le chemin est, comme toujours dans cette Saga, éminemment plaisant. Rien que de l'évoquer ici, quelques temps après ma lecture, je suis joie.

    Cher lectrice·teur, je t'enjoins donc à entamer cette saga, si possible par le titre Cordelia Vorkosigan, afin de connaître toi aussi cette félicité.

     

    Ce billet constitue ma huitième et ultime participation à la huitième saison du Summer Star Wars de M. Lhisbei, porté par Lhisbei et Excel Vador, bénis soient leurs noms dans toutes les galaxies connues et inconnues.

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    PS : oui Lhisbei, tu peux m'inscrire d'office pour l'été prochain. ;)