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Planète SF - Page 12

  • Les Utopiales 2012, atterrissage

    Utopiales.jpgAinsi que je le disais la semaine dernière, et pour la première fois de mes vies de blogueuse et de bibliothécaire réunies (!), je suis allée à un festival de science-fiction, et en plus, celui des Utopiales. Excusez du peu.

    Les prix

    Voici, en premier lieu, le palmarès. Je mets en gras les titres qui m'intéressent le plus :

    Prix Utopiales Européen : « Mordre le Bouclier » de Justine Niogret
    Prix Utopiales Européen Jeunesse : « Saba Ange de la mort » de Moira Young
    Prix Julia Verlanger 2012 : « La Route de Haut Safran » de Jasper Fforde
    Prix spécial du jury de la bande dessinée : « Big Crunch » de Rémi Gourrierec
    Prix du Meilleur Album de SF 2012 : « Daytripper » de Gabriel Ba et Moon Fabio
    Prix SyFy du public (compétition internationale de cinéma) : « Iron Sky » de Timo Vuorensola
    Grand Prix du Jury (compétition internationale de cinéma) : « Eega » de S. S. Rajamouli
    Prix Utopiales de la Compétition Européenne des courts métrages : « La Mysterieuse disparition de Robert Ebb » de Francois Xavier Goby, Clement Bolla et Matthieu Landour
    Prix du meilleur scénario de jeu de rôle : « Héros de guerre » de Victor Bret
    Prix Game Jam de création de jeux vidéos en 48h : ex aequo « Thanks for playing » et « 2012 le jeu »
     
    Et bien entendu, il y a eu le prix Planet-SF des blogueurs 2012, remis samedi 10 novembre à 11h, dont le lauréat est « La fille automate » de Paolo Bacigalupi, traduit par Sara Doke et publié par Au Diable Vauvert. Le trophée a été remis à Sara Doke en présence de Marion Mazauric et d'un tas de blogueurs.

    prix-blogueur-3.jpg

    Photo Christophe Schlonsok


    D'ailleurs, regardez donc l'interview de Gromovar (qui mord et qui est contagieux) réalisée par ActuSF, où il relate l'histoire toute récente de ce prix :


    Hélas, je n'ai lu/vu aucune des oeuvres lauréates... Quoique ça ne devrait pas tarder pour Mordre le bouclier, de Justine Niogret et La fille automate de Paolo Bacigalupi. Une fois que j'aurai fini Black Out de Connie Willis.

    La chance

    mon passe VIP.jpg

    Pour ma première expérience aux Utopiales, j'ai eu un bol de tous les diables : j'y suis allée en tant que professionnelle ; j'avais donc un passe pour toutes les Utopiales :

    Et ça, c'était la classe. Pas de frais d'entrée, pas de file d'attente. Juste du temps devant soi.

    Il y avait deux conférences par heure, j'en ai suivi trois en entier, et beaucoup d'autres par petits bouts. Je n'en parlerai donc guère, allez donc voir les reportages vidéos d'ActuSF, il y a toutes les conférences en ligne.



    Les évènements marquants

    1 - Ma rencontre avec Jeanne A. Debats, la diva de la SF française. Quand je l'ai vue arriver dans la salle de formation vendredi, je n'en croyais pas mes yeux. On aurait dit la Castafiore (en plus jolie). Le coup des lunettes de soleil en pleine journée et en intérieur, je croyais qu'on ne le voyait qu'à Hollywood... Bon, cela n'a rien enlevé à l'intérêt de son intervention.

    2 - Le choc des civilisations quand je suis rentrée dans la librairie : la caverne d'Ali Baba, l'expression de mes rêves les plus fous. Et, bon sang, pas assez de sous pour tout acheter... Misère !

    3 - La remise du prix Planète SF des blogueurs samedi 10 novembre à 11h : un moment émouvant pour moi, qui faisait connaissance avec les autres blogopotes de Planète SF, et émouvant pour tout le monde au moment de l'évocation de l'article 6 du règlement.

    4 - Le pot d'après-prix, pour plusieurs raisons :

    • parce que M. Lhisbei s'est autorisé à son corps défendant une intimité choquante avec mon Maranges Fussières 1er cru de 2008 (mais au moins a-t-il réussi à le libérer de sa gangue de liège !),
    • parce que Yal Ayerdhal est venu s'installer sur les canapés au milieu de nous, tapant la bise aux filles et serrant la pogne aux gars, buvant mon fameux Maranges en papotant des charmes belges de Bruxelles,
    • parce que Sara Doke ADORE le vin du Jura et que Tigger lilly trouve qu'il sent le fromage.

    5 - L'hommage collectif des Utopiales à Roland C. Wagner, décédé cet été dans un accident.

    6- Justine Niogret : cette fille me fait délirer. A la remise du Prix Utopiales, il fallait la voir sauter sur scène comme une gamine en poussant des petits cris quasi ultrasoniques, c'était incroyable. Lors de la conférence Wonder Woman, elle a eu quelques paroles percutantes et bien dans son style d'humour, convoquant poneys magiques, crétins absolus et morues galactiques (cela n'a d'ailleurs pas plu à tout le monde, n'est-ce pas M. Lhisbei...). Pour qui ne connait pas cet humour, je vous renvoie au glossaire en fin de volume dans Chien du Heaume.

    7 - Lhisbei et M. Lhisbei. Je sais, c'est pas juste pour les autres blogueurs, mais voilà, mon bisounours est radioactif, que voulez-vous. J'ai donc rencontré pour la première fois ce couple absolument charmant, et j'espère bien que ce n'est pas la dernière. J'ai souvent évoqué ici la qualité du blog de Lhisbei, trouvant souvent écho de mes analyses dans les siennes (ou l'inverse !) et appréciant sa libre parole. La réalité a dépassé la réalité augmentée, et j'en suis ravie. Et en plus, M. Lhisbei adore le space opera militaire.

    8 - Les rencontres avec les blogueurs. Oui, parce que nonobstant le point 7, j'ai énormément apprécié de rencontrer pour de vrai tous ces gens que je ne connaissais que d'avatar. Je vais tenter de n'en oublier aucun, mais il faut savoir que j'ai loupé les présentations au resto vendredi soir parce que j'étais au petit coin. Donc mille pardons à ceux que je zappe : BiblioMan(u) en premier, et il sait pourquoi, Tigger Lilly, Gromovar Wolfenheir, Guillaume le Traqueur, Endea, A.C. de Haenne (on n'est pas du tout d'accord sur Julian, mais presque sur les fessées), Anudar Bruseis, Lorhkan. Heu, je suis sûre d'en avoir vu d'autres, mais j'ai oublié les noms. N'hésitez pas à me rappeler à l'ordre en commentaires.

    9 - Les rencontres avec les auteursYal Ayerdhal, Sara Doke, Thomas Day, Justine Niogret (elle commence à savoir qui est la tarte qui vient en dédicace sans bouquins...), Georges Panchard, Danielle Martinigol, Nancy Kress (qui a un anglais parfaitement compréhensible contrairement à Norman Spinrad, c'est bien pour ça que j'ai papoté avec elle) les auteurs de « Alter Ego », Sylvie Lainé, Jeanne A. Debats, Claude Ecken, Ugo Bellagamba...

    10 - J'ai découvert pour l'occasion que mon tout nouveau smartphone fait des photos de très mauvaise qualité. La prochaine fois, j'apporte un vrai appareil.


    Mes achats

    Ma carte bleue a chauffé dans l'extraordinaire librairie des Utos, qui rassemble 5 ou 6 librairies nantaises :

    achats Utos.jpg

    « Cherchez les intrus... » Y en a deux qui ne sont pas pour moi. Je vous laisse deviner lesquels.

    Comme à mon habitude, pas de nouveautés de l'année sauf en BD, je suis toujours un peu hors du temps éditorial. Mais je pourrai ainsi découvrir Heinlein par le bon bout de la lorgnette - n'est-ce pas Guillaume ? - et m'initier à quelques auteurs français contemporains.
    J'ai eu des dédicaces de Danielle Martinigol, Jean-Paul Renders, Thomas Day et Georges Panchard.

    Pas Neil Gaiman, non, parce que j'ai acheté le livre trop tard pour faire une dédicace. Mais ce type, que je ne connaissais que de nom, car je n'ai encore rien lu de lui (et oui, les dinos existent, j'en suis la preuve), a gagné mon estime lors que je suis tombée là-dessus sur Facebook :

    Citation Gaiman.jpg

    Un type qui dit du bien des bibliothécaires ne peut être entièrement mauvais.



    Moi

    Une fois n'est pas coutume, j'ai quitté mon habit de lumière galactique pour me fondre dans la masse des Utopiales. Je passais totalement inaperçu. Voyez plutôt :

    Bisounours.jpg

    Photo Tigger Lilly

    Bon, d'autres blogueurs ont déjà fait des retours plus rigolos/complets/référencés sur ces Utopiales :  GromovarEndeaTigger LillyGuillaumeAnudarLionel DavoustOlivier PaquetReS Futurae, ActuSF, Lhisbei.

  • Les vestiges de l'aube, de David S. Khara

    J'ai vu une critique de ce titre chez BiblioMan(u), le super héros des livres, et mon néanmoins estimé collègue. Bon, elle était convaincante, cette critique, alors j'ai lu le roman.

    Vestiges de l'aube.jpg

    Barry Donovan et Werner Von Lewinsky, respectivement policier dépressif et aristocrate esseulé, entretiennent des relations d'amitité via le Web, par des forums d'abord, puis par le biais des mails ou de la conversation instantanée.

    Leurs conversations, qui portent d'abord sur des sujets culturels, glissent peu à peu vers la confidence. Barry se sent démuni dans son travail, voire inutile. Werner s'ennuie ferme dans sa tour d'ivoire. Il décide donc d'aider Barry dans le cadre de ses enquêtes, mettant ses ressources inhabituelles au service du policier.

    Car, roulement de tambour, Werner est un vampire. Oui : avec un nom pareil, on aurait pu s'en douter. Voilà donc le point d'achoppement de l'histoire, qui nous divise, Biblioman(u) et moi. Je trouve l'idée de départ excellente : sortir le vampire de son rôle de séducteur, le lier à une vie humaine par d'autres biais que celui du prédateur, une histoire d'amitié, d'hommes, sur un fond de « vrai » polar... Oui, une bien bonne idée pour nous sortir de l'ornière habituelle.

    Sauf que... La sauce ne prend pas. En tout cas, pas suffisamment pour pouvoir ignorer les grumeaux qui nous restent sous les yeux. Les noms des personnages, rien que ça : ils sont des stéréotypes à eux seuls. On se croirait dans un film de série B. La dépression du policier consciencieux, le rôle exagérément mystérieux de Werner, ses incessantes précautions pour ses déplacements et l'utilisation de ses capacités surnaturelles, son maniérisme surrané en matière de style, de langage... Tout cela est bien trop appuyé pour être crédible.

    Peut-être ne s'agit-il que d'un problème de lunettes. Peut-être sortais-je de trop de lectures plus ou moins abouties incluant des vampires pour apprécier la vraie différence de ce récit (oserais-je avouer que je l'ai lu il y a déjà... 3 mois ! D'où l'utilité pour toi, chez internaute, d'aller me botter les fesses dans ma Pile à Bloguer).

    L'histoire semble terriblement maladroite, et pourtant pleine de promesses. Une suite peut être envisagée, au vu de la fin du roman, mais je m'interroge : l'auteur pourra-t-il gagner en maturité, gommer les ficelles tellements blanches qu'elles en sont fluorescentes ?

    Je n'ai pour l'instant rien lu d'autre de David S. Khara, je ne peux donc pas comparer avec son style habituel. J'espère que, si suite il y a, elle saura développer à son plein potentiel les pépites qui parsèment ce roman et que nous pourrons nous attacher définitivement à Barry et Werner.


    Genre : polar, fantastique

    Editeurs : Rivière Blanche d'abord, puis Michel Lafon, 2011

    PS : Ami internaute/lecteur/blogueur, tu peux remercier BoF, un fidèle de ce blog et néanmoins excellent ami IRL, de m'avoir secoué les puces pour rédiger cette chronique.

  • Les Utopiales 2012, ma prochaine escale

    Utopiales 2012.jpgUne fois n'est pas coutume, je sors de mon trou de bibliothécaire empli de poussières et de toiles d'araignée, et je pars la semaine prochaine rejoindre la galaxie des Utopiales :

    Un monde où se rassemblent les gens bizarres qui aiment parler d'étoiles, de mages et de loup-garous,

    Un monde où des écrivains dont on n'entend jamais parler à la télé reçoivent des distinctions littéraires,

    Un monde où des gens comme vous et moi se costument en personnages aussi absurdes qu'improbables (comment ça, mes macarons et mon sabro-laser sont absurdes ?),

    Bref, un monde merveilleux.


    L'évènement aura lieu du 7 au 12 novembre 2012. Le programme est alléchant, et bien rempli. Je n'aurai jamais le temps de tout faire ! N'étant guère coutumière du reportage photo ou des interviews, contrairement à d'autres blogueurs beaucoup plus doués que moi, je ne te promets rien, lecteur. Mais, on se sait jamais...


    Je devrais y retrouver des blogueurs tels Gromovar, Guillaume le Traqueur, Lhisbei, Lorhkan, Tigger Lilly, Biblioman(u)... Une perspective plaisante pour moi, car parmi ces fiers blogueurs de mon club préféré, Planète SF, je n'en connais qu'un seul IRL (à toi de deviner, cher lecteur)(M. Blop et le principal intéressé ont interdiction de donner la réponse).


    A l'occasion de ces Utopiales, le jury du Prix Planète-SF des Blogueurs remettra ledit prix (un objet contondant) à l'un de ces quatre chanceux :

    • Ainsi naissent les fantômes, Lisa Tuttle, trad. Mélanie Fazi, Dystopia
    • La fille automate, Paolo Bacigalupi, trad. Sara Doke, Au diable vauvert
    • Matricia, Charlotte Bousquet, Mnémos (je l'ai lu mais pas encore chroniqué)
    • Wastburg, Cédric Ferrand, Les moutons électriques

    Que le meilleur (ou celui qui a le défenseur le plus agressif au jury) gagne !

  • Ta Shima, d'Adriana Lorusso

    Durant l'été, je me suis enquillé plusieurs romans de space opera. J'ai donc passé de très bonnes vacances : j'adore ce genre, et en plus, il entre dans le challenge Summer StarWars de Lhisbei (mon chouchou devant l'Eternel Seigneur de la SF).

    ta-shima.jpg

    J'ai donc pour l'occasion découvert Ta Shima, d'Adriana Lorusso. La couverture n'est pas très réussie, je trouve, et ne donne guère d'information sur le contenu du livre. Adoncques, je vous tuyaute : Ta Shima est une planète au climat hostile, suivant une révolution de 16 mois, 12 de pluie incessante et 4 de sécheresse infernale. Sa population est concentrée sur un petit territoire, le seul à être terraformé pour les humains qui y ont atterrit quelques siècles auparavant. Le reste de la planète est dotée d'une flore souvent toxique et d'un faune parfaitement infréquentable.

    Nous découvrons peu à peu cet environnement par les yeux de Suvaïdar, native de Ta Shima. Suvaïdar fait partie des Shiro, une ethnie visiblement dominante, au physique long et gracile et à l'irascibilité légendaire : un Shiro sur deux meurt dans un duel à l'arme blanche. L'autre ethnie ta-shimoda rassemble les Asix, au caractère doux et au physique trapu, dont le rôle effacé tend à les désigner comme les serviteurs des Shiro. Mais, rien sur Ta-Shima n'est aussi simple qu'il y paraît...

    Car Ta Shima est restée à l'écart de la civilisation galactique depuis la fondation de sa colonie humaine, des siècles auparavant. Les arrivants étaient des scientifiques, généticiens pour la plupart, qui ont fui des persécutions. Et la rencontre des ta-shimoda avec les humains de l'Extramonde, lorsqu'elle se produit (rarement), creuse des abîmes d'incompréhension entre les deux parties. La civilisation ta shimoda a évolué de façon drastiquement différente de celle des civilisations de la fédération galactique, selon des règles rigoureuses et pragmatiques, qui semblent aux observateurs extérieurs épouvantablement barbares et arriérées.

    Nous suivons Suvaïdar durant son enfance, puis un bond nous transporte dans son âge adulte. Elle est l'un des très rares Shiro à être partie de Ta Shima de son plein gré, afin de vivre dans l'Extramonde. Son retour sur Ta Shima est le prétexte à une intrigue politique un peu décousue, qui constitue pourtant un fil rouge honorable pour partir à la découverte de cette civilisation originale, vue à la fois de l'intérieur et de l'extérieur.

    La dirigeante de Ta Shima, qui se trouve être la mère de Suvaïdar, a été tuée dans un accident qui fut également fatal à l'ambassadeur de la Fédération sur Ta Shima. Suvaïdar est rapatriée, un peu par hasard, avec la délégation du nouvel ambassadeur de la Fédération. Son voyage en compagnie des extramondains et sa réintégration dans la société ta shimoda constitue le pivot central du récit, qui met en exergue les différences fondamentales entre les deux civilisations : quiproquos et maladresses s'enchaînent, provoquant bien souvent des tensions inexpliquées, car inexplicables, entre les deux parties.

    Le point fort de ce roman, selon moi, réside justement dans l'exploitation du thème des chocs des civilisations : l'autre est l'incompréhensible car méconnu, et chacun de son côté méprise l'autre, qui lui paraît inférieur. Le thème est rebattu, mais je ne l'avais jamais expérimenté de façon aussi intime et détaillée, grâce à la narration de la jeune Suvaïdar. Tous les aspects de la vie quotidienne sont passés au crible de la culture commune, de la sexualité à la politique en passant par l'ameublement et les tâches domestiques.

    Alors, si le récit souffre de faiblesses passagères, si le fil de suspense qui tient le lecteur disparaît parfois, il m'est resté ce que je cherche dans mes lectures : beaucoup, beaucoup de plaisir, et une trace indélébile : le pragmatisme poussé à son paroxysme, c'est à dire plus loin que le cynisme, constitue l'intérêt principal de la société ta shimoda. Je vous laisse découvrir à quel point...

    Après Flashback, Ta Shima est donc mon deuxième coup de coeur de l'année 2012.

     

    Genre : space opera, planet opera, science-ficiont

    Bragelonne, 2007

    Lu aussi par : Lune, Mr Lhisbei, le cafard cosmique (qui n'est pas du tout d'accord avec moi)

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  • Chute libre, de Loïs McMaster Bujold

    saga-vorkosigan-integrale-1.jpgAvant propos

    Loïs McMaster Bujold était pour moi une parfaite inconnue jusqu'à il y a environ deux mois. Au cours d'une sortie en librairie (car les bibliothécaires ne sortent de leur trou à araignées qu'à l'occasion d'achats en librairie - quand ils ne font pas de commandes en ligne...), mon oeil a été attiré par une jolie couverture de J'ai Lu, qui annonçait : Saga Vorkosigan, Intégrale, tome 1. Et il y avait le tome 2 à côté.

    Saga Vorkosigan ? Jamais entendu parler. Puis je vois la mention "prix Hugo" plusieurs fois répétée. Plusieurs des romans de la saga l'ont reçu ?! Connaissant le génie d'un Vernor Vinge, deux fois lauréat de ce prix, je me dis que là, j'ai un trou dans ma culture SF. Bref, le marketing (belle couv + indication des prix littéraires) a fonctionné sur mon pauvre esprit avide de space opera. Et l'auteur est une femme, ce qui en matière de space opera justement, reste assez rare. J'ai donc acheté les deux tomes de l'intégrale.

    Ceux-ci regroupent plusieurs romans et nouvelles. Chute libre, aussi intitulé ailleurs Opération cay, est le premier roman de la première intégrale, et n'a pas de rapport direct avec le héros éponyme, Miles Vorkosigan. Il a obtenu le prix Nebula en 1988.


    chute libre.jpgChute libre / Operation Cay

    Leo Graf, spécialiste des soudures en milieu spatial, est envoyé par sa compagnie dans une station orbitale pour y enseigner son art aux ingénieurs qui y vivent. Il découvre sur place une réalité déconcertante : ses élèves sont des Quaddies, des êtres dotés de quatre bras, produits de l'ingéniérie génétique destinés à pallier les inconvénients du travail en apesanteur. Issus de la recherche, les plus âgés forment une génération de jeunes gens d'environ 20 ans, tous les autres étant encore des enfants.

    Bien que leur humanité ne fasse aucun doute pour qui les côtoie, Léo Graf le premier, ils sont le produit de la recherche, des objets bien plus que des sujets, soumis à la loi de l'offre et de la demande. Les améliorations génétiques et le cadre strict de leur éducation les ont rendu dociles, soumis aux impératifs de productivité. Cet état de fait crée un malaise chez Léo, qui pressent le pire pour les Quaddies...

    Ce court roman (une novella, peut-être, selon les standards américains) bénéficie d'une solide construction narrative, au service d'une histoire sympathique et divertissante. Le tout déborde un peu d'optimisme et pas assez d'originalité, mais cela ne m'a pas empêché de l'apprécier. Les Quaddies sont suffisamment attachants pour qu'on s'y intéresse, bien que leur naïveté puisse être fatigante, en résonnance avec celle du propos global.

    J'ai par ailleurs apprécié la belle cohérence de l'univers créé par Lois McMaster Bujold, qu'on retrouve plus tard dans l'intégrale avec le "vrai" commencement de la saga Vorkosigan. Les résultats physiques et sociaux de l'ingéniérie génétique sont exposés avec assez de vraisemblance pour me convaincre (certes, ce n'est pas difficile, car je ne suis pas scientifique) et les enjeux de la création et de l'exploitation des Quaddies plutôt bien trouvés.

    Une lecture agréable, sans génie, mais charmante.

    Genre : space opera

    Editions J'ai Lu, 2011

     

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  • La cité de perle, de Karen Traviss (Les guerres Wess'har, tome 1)

    La cité de perle est le premier roman traduit en français de l'auteur anglaise Karen Traviss, connue par ailleurs pour ses nombreux ouvrages de l'univers de Star Wars. Ce n'est donc sans doute pas un hasard que ce billet ouvre - chez moi du moins - le cycle des chroniques consacrées au Challenge Summer StarWars épisode VI de Mr Lhisbei et Lhisbei herself.

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    Karen Traviss, dans ce roman, développe la thématique écologique en prenant pour base une planète, Cavanagh, dont l'écosystème est férocement protégée par un guerrier hors norme, Aras. Les habitants naturels de la planète sont des formes de vie aquatiques, les Berezi. Quelques humains, arrivés il y a plusieurs générations, se sont installés sur la planète Cavanagh selon les conditions drastiques posées par Aras. La communauté est isolée du reste de la planète, confinée dans un espace terraformé pour elle, afin de lui permettre de cultiver les plantes nécessaires à sa survie. Un champ de force sépare leur territoire du reste de la planète, afin d'éviter toute contamination exogène.

    Les colons humains sont parfaitement satisfaits de leurs condition de vie, en accord avec leurs profondes convictions écologiques, politiques et religieuses. Ils ont dans ce sens envoyé un message au reste de l'humanité, signifiant qu'ils pouvaient les oublier et que tout allait bien, merci pour eux.

    Bien entendu, ils obtiennent le résultat inverse : une mission composée de scientifiques et de marines est envoyée vers eux, un voyage de 75 ans. La mission est dirigée par Shan Frankland, une officier de la police environnementale, et Lindsay, une militaire. Cette mission représente un enjeu énorme pour tous ses membres, puisqu'à leur retour chez eux, si retour il y a, tous leurs proches auront disparu.

    Arrivées sur place, les dirigeantes découvrent rapidement les règles du jeu et les conditions sans appel posées par Aras, payant brutalement le prix du sang pour la désobéissance d'un des membres de l'équipe. Aras appartient au peuple Wess'har, qui habite sur la planète voisine du système. Ce peuple, écologiste convaincu, n'hésite pas à exterminer les colonies polluantes mettant en danger les espèces locales. Aras est un de leurs champions en la matière...

    Une étrange entente s'installe entre Shan Frankland et Aras, les deux solitaires, alors que le Capitaine Lindsay, aux prises à avec des problèmes personnels déstabilisants, se replie sur elle-même. Vient un moment où les explorateurs doivent choisir leur camp ; celui des colons et d'Aras, ou celui du reste de l'humanité, qui vient frapper aux portes de ce lointain système...

    Dépaysement. Voici le maître mot de ce roman. On n'est jamais chez soi. Et c'est bien ! J'ai apprécié ce roman parce qu'il m'emmène ailleurs, en compagnie de gens différents - on découvre progressivement à quel point l'est Aras, tellement différent même qu'il ne ressemble en rien à ce qu'il était initialement.

    Je n'irai pas chercher dans ce roman de profondeur philosophique, à part l'évidente importance du thème écologique ; on y voit les bienfaits, les dérives et tous les dommages collatéraux provoqués par la défense de l'écologie poussée au bout de son raisonnement. Le questionnement est intéressant, et il est dans l'air du temps.

    L'écriture de Karen Treviss a l'avantage de la simplicité : avec un contexte aussi exotique, c'est en effet un atout pour emmener rapidement le lecteur dans son univers. Elle a bien travaillé certains de ses personnages, particulièrement Shan Frankland et Aras, dont les motivations profondes sont singulières et attachantes, mais les autres protagonistes sont plus caricaturaux.

    Je n'ai pas développé une passion ardente pour ce roman, pourtant intelligent. Peut-être est-il tout simplement honnête, manquant un peu de l'ambition d'oeuvres comme celles de Vernor Vinge (Un feu sur l'abîme, Au tréfonds du ciel), qui restent pour l'instant mes références en space et planet opera (hors Honor Harrington, bien entendu).

    Il reste que ce fut une expérience plaisante, et que je lirai avec curiosité d'autres titres de cette auteur.

    Bragelonne, 2006.

    Genre : planet opera, space opera, science-fiction

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  • Flashback, de Dan Simmons

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    Flasback est le dernier roman traduit en français de Dan Simmons. Hypérion est son roman le plus connu, un véritable chef d'oeuvre de la littérature de science-fiction, qui a reçu, entres autres, le prix Hugo en 1990... Un chef-d'oeuvre que j'ai détesté de bout en bout. Je partais donc d'un très mauvais pied avec Dan Simmons, mais je voulais lui laisser une deuxième chance.

    Il faut dire que l'histoire de Flashback est très, très loin de celle d'Hypérion (pour ceux qui ne connaissent pas, allez donc faire un tour par ici). Nous sommes là sur une anticipation proche (20 ans), dans une Amérique du Nord qui ne tourne plus rond : les Etats-unis ont presque disparu, éclatés en plusieurs territoires indépendants, et le reste est soumis à la loi économique et financière de grands groupes japonais. Le Japon a gardé son agressivité économique tout en revenant sur le plan politique à l'époque féodale. Les nouveaux shôgun sont des chefs d'entreprise richissimes, qui tiennent lieu de gouverneur sur leurs territoires. La Chine, implosée en clans comme à l'époque pré impériale, fait les frais de l'agressivité nippone. Ailleurs, l'émergence d'un Califat Global, dont le fanatisme religieux a contaminé une bonne partie du monde ocidental, a fait disparaître les forces politiques européennes.

    Au milieu de ce marasme social, politique et économique, Nick Bottom est un ancien policier, licencié de la police de Denver pour cause de toxicomanie. Nick a perdu sa femme Dara dans un accident 6 ans plus tôt, alors qu'il enquêtait sur la mort d'un jeune japonais, Keigo Nakamura. Comme la majorité de ses concitoyens, Nick est alors devenu accro au Flashback, une drogue qui permet de revivre ses souvenirs, si possible les meilleurs. Végétant désormais des aides publiques dans un appartement-cellule, il vit dans le passé, oublieux de son fils laissé à la garde de son beau-père de l'autre côté du pays.

    Mais le père de Keigo Nakamura, Hiroshi Nakamura, fait appel à lui pour enquêter à nouveau sur la mort de son fils. Nakamura est une pointure économique et politique, multimilliardaire et conseiller pour la reconstruction des Etats-Unis. Il met donc à la disposition de Nick de gros moyens pour reprendre l'enquête, assortissant ceux-ci de menaces non voilées sur sa personne en cas de défection.

    Avec les pérégrinations plus ou moins contrôlées de Nick, le lecteur découvre les coins et recoins sombres de cette amérique morcelée, les dégâts causés par le flashback dans une société qui implose, muselée par l'absence d'une vision d'avenir, ainsi que sa dépendance vis-à-vis des aides extérieures - japonaises de préférence. La violence et l'insécurité y sont omniprésentes, et des rumeurs courent : le flashback aurait été inventé dans un laboratoire israélien, avant qu'Israël ne soit rayé de la carte par une attaque nucléaire.

    Etant donné que je ne spoile pas, je n'irai pas plus loin dans le déroulé de l'histoire. Mais l'internaute apprendra avec profit que l'une des caractéristiques les plus marquantes de ce récit tient à la vision politique de l'auteur.

    Comme a dit Gromovar, un blogueur qui bénéficie de tout mon respect :

    "C'est quand même la preuve de l'existence d'une idéologie dominante au point d'en être totalisante que de constater l'impossibilité qu'a quiconque de parler de Flashback sans s'interroger longuement sur les positions politiques de Dan Simmons."

    (Source : le forum de planète SF, )

    Car en effet, Dan Simmons est un conservateur de la plus belle eau, de ceux qu'on voit dans les reportages français, qui refusent de tuer les p'tits nenfants dans le ventre de leur mère - au risque de pourrir la vie de ladite mère -, prônent l'abstinence comme méthode d'éducation sexuelle et pour qui tout homme un peu trop bronzé, musulman de préférence, incarne le Mal. Enfin, là, j'extrapole, mais disons que la vision conservatrice de Dan Simmons imprègne toute son oeuvre, et que Flashback ne fait pas exception.

    Pour résumer son propos, si les Etats-Unis se retrouvent dans cette impasse, c'est de la faute de Barack Obama et des aides sociales. Aussi un peu de la faute de ces imbéciles de communistes européens qui ont laissé les musulmans imposer leurs lois dans leurs sociétés. Bref, une vision des choses qui, de l'autre côté de l'Atlantique, dans notre beau pays de France par exemple, a comme des relents nauséabonds.

    Sachant que je ne suis pas plus intelligente que la moyenne et que l'idéologie dominante évoquée par Gromovar m'a atteint comme les autres, j'avoue avoir eu peur, en cours de lecture, de devoir laisser choir le roman comme une chaussette... nauséabonde, justement. Mais en réalité, il n'en fut rien ; j'ai savouré ce roman chapitre par chapitre, admiré la maestra de l'auteur pour mener ce thriller de bout en bout, avec un contexte neuf sur une trame classique. J'ai adoré son inventivité, tous les détails crus du quotidien d'une société privée d'avenir, le décorticage des motivations de chacun dans un monde en miettes. J'ai été fascinée par cette Amérique en perdition, qui, de manipulatrice, est devenue manipulée, tombée dans la dépendance financière et l'addiction à la drogue. Le petit plaisir sadique d'une française revancharde ? Peut-être. Il s'agit surtout d'une admiration non dissimulée pour cet auteur qui a su montrer de façon plus que réaliste la chute sans gloire des puissances occidentales face aux pays dit encore aujourd'hui "émergents".

    Voilà, pour moi, Flashback est un très bon roman ; pour l'instant, c'est même le meilleur que j'ai lu cette année.

    Robert Laffont, collection Ailleurs & Demain, 2012.

    Genre : anticipation, thriller

    Lu aussi par : Gromovar, Guillaume le Traqueur, Xapur, Anudar, Lorhkan, Calenwenn, Cachou