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Impromptu - Page 14

  • Bilan des Oniriques

    Dimanche, je suis allée faire un tour à la première édition des Oniriques à Meyzieu. Voici quelques impressions de mon voyage...

    Du rêve pour tous : autant les petits que les grands pouvaient trouver leur compte de rêve et de passion.

    • Des dragons en quantité, des lutins, des faunes, des sorcières, des jeux de piste et des fresques pour les petits (j'ai appris pour l'occasion de la bouche d'une sorcière en chair et en os que le lutin irlandais est le Leprechaun),
    • des vampires, des steampunks, des jeux de rôle, une "murder party" pour les plus grands,
    • une belle librairie éphémère pour tous, constituée des fonds de 3 librairies et 5 éditeurs (dont les 3 indé de l'imaginaire), avec moult auteurs zé illustrateurs en dédicace.

    Une conjonction miraculeuse :

    • alors que le temps prévu pour ce week-end était censé être pourri, la météo fut extraordinaire samedi et dimanche, avec soleil estival et températures clémentes.
    • alors que nous sommes en pleine période de vacances d'hiver, étrangement, les lyonnais ne sont pas tous partis au ski. Je le sais, je les ai vus à Meyzieu un dimanche matin !

    Des invités heureux :

    J'ai eu l'occasion de croiser rapidement plusieurs auteurs et éditeurs contents d'être là (mais sans dédicace, j'avais pas le temps) : Ayerdhal, Sara Doke, Philippe-Henri Turin (illustrateur de dragons magnifiques), André-François Ruaud, Danielle Martinigol... J'en oublie. Plusieurs m'ont confié qu'ils étaient surpris du monde au festival, satisfaits de l'accueil et de l'organisation et d'autres que, selon leurs estimations, il y avait bien plus de public que pour le premier opus des Imaginales.

    Un bon présage ? Je l'espère, ravie que je suis d'avoir un festival de l'imaginaire près de chez moi...

    Un public détendu :

    L'ambiance du dimanche matin était très cordiale, familiale, avec des tas de parents accompagnant leurs enfants (ou l'inverse), et contrairement à ce que j'ai l'habitude de voir en médiathèque, beaucoup de papas avec leurs enfants. Des papas barbus et chevelus, avec des T-shirt chelou et des dégaines d'extra-terrestres... Qui ne doivent habituellement pas mettre les pieds dans les bibliothèques, pensant qu'on se foutrait d'eux s'ils expliquaient ce qu'ils aiment lire. J'ai vraiment apprécié cette ambiance.

    Je tire mon coup de chapeau aux bibliothécaires et aux bénévoles des associations partenaires, souriants, disponibles, voire... très, très loquaces dès qu'on abordait leurs stands.

    Et des félicitations méritées à la coordinatrice du projet, Frédérique Malvesin, bibliothécaire de son état (sans chignon ni lunettes) et grande lectrice de l'imaginaire. Il fallait une personnalité comme elle pour faire décoller le projet. Elle a certainement dû finir le week-end sous perfusion de Redbull (pour ne pas dire rail de coke, c'est prohibé) pour rester debout, et je m'incline bien bas devant la performance.

     

    Des photos, prises dans la médiathèque et sur le marché :         (photos tous droits réservés)

    L'exposition Dragons en folie, dessins de Philippe-Henri Turin, à tomber par terre, et les réalisations des enfants de Meyzieu pour l'occasion :

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    Magnifique carte de France des dragons

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Extrait d'un livre illustré par Philippe-Henri Turin. Une merveille.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Des dragons réalisés en atelier dans les écoles ou les centres de loisir...

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Un bébé dragon sortant de l'oeuf...

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Il suffit de lire le carton...

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    L'expo des illustrations de Gilles Francescano. Je vous laisse savourer ces extraordinaires tableaux.

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    Tout le monde reconnaîtra l'illustration du plus primé et hélas dernier livre de Roland C. Wagner.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Un chouette marché artisanal :

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    Magnifique dragon de métal à l'échoppe du forgeron.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Broderie traditionnelle, un boulot dont je ne voudrais pour rien au monde...

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Deux types avec des bois sur la tête, des faunes, pour tout dire, dont un qui faisait semblant de parler mais qui parlait pas, et l'autre qui faisait semblant de pas parler mais qui parlait...

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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    Des crêpes au feu de bois, avec chaînes, poëles en fonte suspendues au bout, et foyer à bois dessous. Une invention du monsieur. Sympa, non ?

     

     

     

     

     

     

     

     

    Une médiathèque selon mon coeur :

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    les bibliothécaires de Meyzieu ont mis pile en face de l'entrée de la salle adulte l'"espace F" (pour SFFF), comme un bâton de maréchal brandi à la face des gens qui croient encore que les littératures populaires sont de la merde qu'il faut cacher dans les coins sombres.

     

     

     

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    Et ils ont décidé d'y mettre absolument toutes les oeuvres qui sont susceptibles de relever du genre imaginaire, dont du Marc Lévy... et du Julien Gracq !

  • Enfin, les Oniriques !

    Lyonnais, Rhonalpins, Français, réveillez-vous ! Les Oniriques arrivent demain à Meyzieu.

    Les Invités des Oniriques 2013Du vendredi 8 mars au dimanche 10 mars, les Oniriques prennent possession de la médiathèque de Meyzieu (69) et quelques lieux adjacents, afin de vivre au rythme de l'imaginaire. Auteurs, dessinateurs, éditeurs, libraires, jeux, expositions, projections, concert, rencontres, ateliers, spectacles, magie, marché artisanal... Il y aura de tout, pour tous les âges et tous les goûts, du vampire au steampunk en passant par les femmes dans la littérature de SFFF.

    Le festival a été monté par la médiathèque en collaboration avec un ensemble d'associations de la région orientées sur l'imaginaire ou le Moyen-Âge: AOA Production,  CLIVRA, CoLibris,Compagnie Excalibur, Cyberunes, The Lyon Beefsteak Club.

    On comptera parmi les auteurs : Ayerdhal, Etienne Barillier, Karim Berrouka, Jean-Luc Bizien, Nadia Coste, Marie-Hélène Delval, Sara Doke, Anne Fakhouri, Gilles Francescano, Marika Gallman, Florent Gounon, Alain Grousset, Ange, Jean-Philippe Jaworski, Vincent Joubert, John Lang, Nathalie Le Gendre, Li-Cam, Danielle Martinigol, Pierre Pevel, André-François Ruaud, Valérie Simon, Adrien Tomas, Ciro Tota, Philippe-Henri Turin, Jérôme Vincent.

    Je mets de l'enthousiasme à faire la pub de ce festival parce que :

    • c'est une première du côté de la littérature de SFFF à Lyon,
    • c'est une médiathèque qui organise l'évènement.

    Gentes dames, gentilhommes, space orks et autres loup-garous, rendez-vous donc à Meyzieu à partir de demain !

  • Janua Vera, de Jean-Philippe Jaworski

    janua-vera.jpgJean-Philippe Jaworski est un orfèvre de la langue française. Il cisèle ses textes comme d'autres les gravures à l'eau-forte, il pastiche, il détourne. Il sait tous les styles, tous les tons, toutes les trames. Il sait aussi les hommes, leurs passions, leurs crimes et leur drôlerie.

    Il met la première au service des seconds. Et on en redemande.

    Le recueil de nouvelles Janua Vera, dans l'édition de 2010, contient 10 nouvelles. Jaworski, pour ceux qui l'ignorent encore, nous a également régalé d'un roman de tout premier ordre, Gagner la guerre.

     

    1 - Janua Vera

    Le roi Leodegar le Resplendissant, Roi-Dieu de Leomance, fait de mauvais rêves... On entre dans l'ordre chronologique de l'histoire avec cette première nouvelle courte. Elle ne m'a pas laissé beaucoup de souvenirs, mais elle fait office de mythe fondateur pour le Vieux Royaume.

    2 - Montefellone

    Une nouvelle orientée vers la tradition militaire et chevaleresque des grands récits d'héroic fantasy, qui nous rappelle forcément Le trône de fer. Au beau milieu d'un guerre, des généraux doivent choisir entre un ordre direct de leur souverain (occuper Montefellone) ou lui rendre service en volant à sa rescousse en désobéissant aux ordres.

    Complots, trahisons, valse-hésitation des uns et des autres et surtout, le thème de la loyauté : qui est loyal à qui, comment, pourquoi, et quelle loyauté est la mieux récompensée ? Pas toujours la plus honnête, il faut croire...

    3 - Mauvaise donne

    La nouvelle attendue par tous ceux comme moi qui ont lu Jaworski dans le désordre, soit Gagner la guerre avant Janua Vera.

    « Mauvaise donne » met en scène la première apparition de Benvenuto Gesufal, crapule et assassin des bas quartiers de Ciudalia, empêtré dans les rêts d'un complot beaucoup trop gros pour lui. Empruntant aux romans d'aventure, aux ambiances de polars noirs et aux conspirations machiavéliques (au sens propre du terme, Machiavel n'est jamais loin...), cette nouvelle réjouit le lecteur par sa vivacité et son humour. Les joutes verbales sont délicieuses. Voici un extrait (déjà moult fois cité, mais tant pis) :

    « Je souhaiterai obtenir un entretien avec sa seigneurie.
    Elle me connait : j'ai déjà eu l'honneur de la daguer. »

    4 - Le service des dames

    Aedan, incarnation du chevalier à l'honneur sans tache et sans reproche (je ronfle déjà), rend service à une gente dame afin de jouir du droit de passage d'un pont. Il lui faut aller chercher noise au vil et méchant voisin. Sauf que cette histoire sent très mauvais, et qu'au final, il y a des baffes qui se perdent. Pour la gente dame, surtout.

    Oui, je suis violente. Il faut dire que mon sens de l'honneur est inexistant, contrairement à ce pauvre Aedan qui se débat au milieu de ses grands principes. Un exercice de pastiche assez réussi, bien que le sujet m'intéresse peu.

    5- Une offrande très précieuse

    Certainement l'une des nouvelles qui m'a le plus touchée. Sans doute parce qu'elle en appelle à la fibre parentale qui sommeille en chacun de nous ;  j'en suis presque certaine parce que je pense que l'histoire m'aurait laissé froide il y a quelques années.

    Cecht et Dugham sont soldats. Dugham est blesséau combat, Cecht tente de le sauver en traversant une forêt immense avec son camarade sur le dos. Cecht est une brute, il a peu de cervelle, et il le sait. Parce qu'il le sait et qu'il fait un choix altruiste mais sans doute fatal pour sa survie, Cecht nous est rapidement sympathique. Il rencontre une vieille sorcière qui, pour soigner son compagnon, lui demande de faire une offrande. Une offrande atypique, qui fait appel à ses souvenirs les plus profondément enfouis et à une sensibilité qu'il ne se soupçonnait pas.

    Une belle réussite que cette nouvelle.

    6 - Le conte de Suzelle

    Tristesse insondable, temps perdu, désillusion, rêves disparus... Cette nouvelle est belle, mais si triste.

    Suzelle est une petite fille débordante de vitalité et de gaieté, lorsqu'elle fait une rencontre qui bouleverse sa vie. Son interlocuteur la marque à jamais, et dans l'attente d'une promesse et d'un retour, elle laisse passer son existence. Mariage, travail, enfants, vieillesse... Le temps passe, dans cette paysannerie rude et parfois sordide.

    Le rêve d'une vie jamais vraiment vécue.

    [soupir]

    7 - Jour de guigneJanua vera - Gagner la guerre 2.jpg

    Calame le scribe est victime du syndrome de Palimpseste. Parce qu'il a utilisé un parchemin ensorcelé, sa vie se réécrit sous ses yeux ébahis et sa volonté impuissante. On rit beaucoup dans cette nouvelle absurde et parfois potache, toujours soignée du point de vue du style.

                                                                     éd. spéciale de Janua Vera et Gagner la guerre

    8 - Un amour dévorant

    A Noant-le-Vieux, la nuit, les bois sont hantés par des appeleurs, à la recherche d'une jeune femme. Tous sont morts depuis des siècles, mais ils vivent encore sous les futaies, ombres parmi les ombres. Un prêtre du culte du Desséché mène son enquête pour éclaircir l'histoire, interrogeant chaque témoin. 

    Cette nouvelle pose une atmosphère à la Edgar Allan poe, dans la plus pure tradition fantastique du 19e siècle, hantée par les esprits, les revenants, et la fascination pour la mort (en lien avec le culte du Désséché). Personnellement, je n'aime pas particulièrement ce genre, mais il est une fois de plus excellemment mis en oeuvre par Jaworski.

    9 - Comment Blandin fut perdu

    Un peintre errant se voit confier un chantier dans un monastère, ainsi qu'un apprenti doté d'un talent extraordinaire. Le maître ne comprend pas la hâte du monastère à se débarrasser du génie, jusqu'à ce qu'il se rende compte que son apprenti est obsédé par une femme, une seule, et qu'il ne cesse de la peindre. Incapable de varier, il intègre son visage à toutes ses oeuvres, partout, tout le temps, comme un poison lentement instillé...

    Une histoire originale.

    10 - Le confident

    Cette nouvelle aborde d'un peu plus près le culte du Desséché, avec l'histoire d'un prêtre qui décide de se faire enfermer dans le noir total, une sorte d'expiation volontaire, et dont il décrit les étapes angoissées. L'anxiété monte, avec elle les peurs et les cauchemars, à la lisière entre sommeil et veille, rêve et réalité...

    N'étant pas fan de l'épouvante, je n'ai pas particulièrement accroché à cette nouvelle, qui, étant la dernière du recueil, la termine sur une note sombre. Un peu dommage pour moi, mais pour ceux qui aiment, c'est toujours réussi.

     

     ed. spéciale Janua Vera et Gagner la guerre

    Janua vera - Gagner la guerre.jpgLe recueil terminé, mes impressions globales de lecture (avec du recul, je l'ai terminé il y a quelques temps) sont les suivantes :

    • Je n'aime pas particulièrement le format nouvelle. Vieille école, vieilles habitudes, vieille bibliothécaire... On pourra trouver quantité d'explications à cet état de fait ! Lire 10 nouvelles de suite m'a donc demandé un effort certain, que je ne pense pas réitérer de si peu. Une ou deux nouvelles à la fois suffiront largement pour mes futures expériences. Par comparaison, la novella, comme Palimpseste de Charles Stross, me convient mieux.
    • Mes goûts personnels me portent peu vers le fantastique, les revenants, l'épouvante et la fascination pour la mort, ni d'ailleurs vers ce qui est noir et désespéré... Des thèmes plutôt récurrents dans ce recueil, particulièrement vers la fin. Je ne peux donc pas dire que je l'ai adoré. [Oui, les bisounours ne sont pas loin, mais que voulez-vous...]
    • Bien que moins enthousiaste qu'à la lecture de Gagner la guerre, en cause les raisons précédemment évoquées, je reste séduite par la qualité de l'écriture de l'auteur. Il sait vraiment tout faire, tant sur le fond que dans la forme. Et il met sa forme très travaillée au service d'un fond qui ressemble à tout sauf à cette autofiction si chère à notre intelligentsia littéraire, que j'abhorre. Rien que pour cela, Jean-Philippe Jaworski est mon ami. Enfin, non, mais... Remarquez, je peux toujours le lui demander sur Facebook, on ne sait jamais !
    • Mes nouvelles préférées sont donc : Mauvaise donne, parce que Benvenuto Gesufal, et Une offrande très précieuse, parce que tout le monde aime un jour, quel qu'il soit. [Quand je vous disais que les bisounours n'étaient pas loin]. Avec une mention spéciale pour Le conte de Suzelle, parce que l'histoire a beau être triste à en mourir, elle est magnifique.

    Tous les aficionados de Jean-Philippe Jaworski attendent avec impatience la sortie de son prochain roman, toujours aux Moutons électriques, en août 2013 : Même pas mort sera le premier tome d'une trilogie intitulée Les Rois du monde.

    Et rien que pour vous faire baver un peu, sachez donc que je devrais rencontrer le monsieur le week-end prochain, aux Oniriques à Meyzieu. Et toc.

     

    Ce billet est dédié à Tigger Lilly, parce qu'elle a été la première à demander une chro de ma PAB.

    Edition : Les Moutons électriques, 2010 (édition augmentée)

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  • Palimpseste, de Charles Stross

    Palimpseste est une novella de Charles Stross, par ailleurs auteur de la série Les princes marchands. Palimpseste a obtenu le prix Hugo en 2010. J'ai acheté ce livre pour ma bibliothèque personnelle durant les dernières Utopiales (je le signale car j'achète assez peu de livres pour moi).

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    Palimpseste raconte l'histoire de Pierce, un patrouilleur du temps, qui parcours l'histoire de la Terre afin d'intervenir sur des points de divergence, des noeuds dangereux pour l'humanité. La Stase, son employeur, est chargée du maintien de la population et de l'histoire humaine sur la Terre, quelles que soient les époques. Son action court sur des millions d'années.

    On suit donc Pierce tout au long des vingt années de formation qui lui sont nécessaires pour devenir un véritable agent de la Stase, vingt ans à parcourir le temps, à se fondre dans la masse, à éviter des catastrophes, à tomber amoureux... A se faire tuer aussi. Car Pierce meurt à plusieurs reprises, mais la Stase le ramène chaque fois à la vie.

    Il arrive parfois que les agents de la Stase tombent en plein palimpseste : une scène qui a été effacée et réécrite plusieurs fois. Un véritable casse-tête chinois...

    La Stase charge aussi parfois ses agents de déplacer des populations dans le temps, afin de mener des "Réensemencements". Ceux-ci permettent à l'humanité de "repartir" au lieu de s'éteindre, comme le voudrait la loi de l'évolution. Elle utilise également les ressources de civilisations scientifiques pour éviter à la Terre de s'éteindre avec la mort du Soleil.

    Pour devenir agent, Pierce doit faire un sacrifice : se couper de ses racines, et pour le prouver, il doit aller dans son passé tuer son grand père. Il doit même, en fin de formation, se tuer lui-même, un soi déviant qui a pris un autre chemin et qui doit être éliminé. Une carrière difficile, mais qui a ses avantages : une vie extrêmement longue, le sentiment d'être utile à l'humanité entière, et la possibilité de se retirer parfois plusieurs années dans une civilisation paradisiaque dont il est le demi-dieu.

    Mais Pierce découvre que la réalité se révèle plus compliquée encore lorsqu'il arrive enfin à consulter la grande bibliothèque du temps, le bien le plus précieux de son employeur...

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    Palimpseste a beau être un roman court, il contient littéralement plusieurs mondes. Une terre comme jamais on ne l'aurait imaginée, avec de multiples dérives des continents, des miliers de civilisations, et une géographie astronomique changeante : *attention spoiler* la Terre quitte même le système solaire pour partir "vivre sa vie" dans l'espace intergalactique !

    Charles Stross utilise l'ellipse à l'envie afin de parvenir à ce résultat extraordinaire, un procédé qui pourrait en agacer certains. J'ai pour ma part accepté sans rechigner la méthode, qui permet de ne pas perdre de temps et d'aller toujours à l'essentiel.

    Bien entendu, les multiples voyages dans le temps du personnage central brouillent rapidement les cartes. Les paradoxes temporels s'accumulent et il faut bien avouer qu'au bout d'un moment, les ellipses aidant, j'ai cessé de vouloir tout comprendre dans la chaîne de causalité. Ce qui m'a finalement aidé à apprécier l'histoire racontée, celle d'un homme prisonnier du temps qu'il arpente pourtant sans limites.

    En aparté, je conseille au lecteur intéressé par les thèmes du voyage dans le temps et de l'uchronie de lire ce fil de discussion du Planète Sf. Une bonne façon de comprendre la différence fondamentale entre les deux... On peut aussi aller voir la série canadienne Continuum, qui exploite à bien plus petite échelle l'idée du voyage dans le temps.

    Pierce cherche un sens à son travail, une certitude de faire le bien en fin de compte. Comme il a dû, pour accéder à ce poste, employer la violence, il a besoin d'un garde-fou éthique : "qu'importe les moyens, pourvu que la fin soit honorable". Et la recherche de cette caution morale l'amène sur bien des chemins, en bien des temps...

    Palimpseste a été pour moi un très beau roman, bref et intense. La fin de l'histoire nous laisse dans l'incertitude, mais je n'en attendais pas plus... ou pas moins ?

     

    PS : ami lecteur, tu peux remercier Vert et Lhisbei pour leur kick ass, qui a permis à cette chronique de voir le jour. C'est comme un accouchement : il est inéluctable, mais on a souvent besoin d'un coup de main pour le mener à bien !

    Editeur : J'ai lu, collection "nouveaux millénaires", 2011

    Genre : science-fiction, voyage dans le temps

                                

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    Ce billet entre dans les challenges Winter Tilogog JLNN.jpgme Travel de Lhisbei et Je lis des Nouvelles et des Novellas de Lune.                           

     

     

     

  • Un bilan qui fait mal...

    ... à l'égo.

    Inspirée par les divers bilans annuels lus ça et là dans la blogosphère, j'ai pris mon courage à deux mains et décidé de compter... Ce que je ne faisais jamais auparavant.

    Compter quoi ? Et pourquoi compter, d'abord ?

    J'ai compté mes lectures depuis un an, ainsi que les billets qui en découlaient. Je les ai comptés pour me faire une idée de mon rythme de lecture et de rédaction car je me doutais que je lisais moins qu'il y a trois ans, et je savais que je rédigeais moins... Et voici le résultat :

    Chroniqués  :

    • 23 romans
    • 1 film

    Pas chroniqués :

    • 23 romans itou
    • 2 nouvelles
    • 1 recueil de nouvelles

    J'ai donc lu 46 romans, 1 recueil de nouvelles et deux nouvelles en un an. 

    Cela fait moins d'un livre par semaine, ce qui est une nette baisse de rythme de lecture par rapport à il y a 3 ans, mais qui n'a rien d'étonnant. Cela fait quand même un peu mal, quand on sait que j'étais une très grande lectrice (minimum un livre par semaine), et que mon métier me pousse de toute façon à la lecture. Mais, ami amateur de littérature de l'imaginaire, sache que je privilégie toujours les lectures de SFFF aux autres, même quand mes impératifs professionnels exigeraient qu'il en soit différemment. La rentrée littéraire me laisse toujours un peu sur le carreau...

    Mon rythme de blogueuse a lui aussi nettement diminué, ce qui est plus embêtant. J'ai chroniqué seulement la moitié des oeuvres que j'ai lues, l'autre moitié étant visible dans ma Pile à Bloguer. Je remarque que je suis plus active sur le forum de planète SF et sur Facebook (peut-être parce que j'ai un smartphone depuis 3 mois ?), je vais plus souvent lire et commenter chez les autres qu'auparavant, mais je délaisse mon chez-moi. Il faut dire que la plateforme ne me convient plus tout à fait. Je cherche à voir si l'herbe ne serait pas plus verte ailleurs. Mais il serait plus honnête de reconnaître que je suis atteinte d'une flemmingite aigüe, qui me pousse à une procrastination de mauvais aloi.

    Et puis, je regarde des séries télé. Cette année, j'ai visionné :

    • l'intégrale du Trône de Fer,
    • la saison 1 de Once upon a Time,
    • les 2 saisons de Teen Wolf,
    • tout Terra Nova,
    • Outcasts,
    • The Event,
    • la saison 5 de True Blood,
    • la fin de la saison 3 de Vampire Diaries,
    • je commence Continuum.

    Alors évidemment, quand on regarde une série, on ne lit pas, et on ne rédige pas de billet...

    Les bonnes résolutions finissant toujours ou presque dans les égouts, je ne peux que vous demander un coup de main, à vous, mes lecteurs. J'ai besoin d'un bon kick ass. Mettez moi un bon coup de pied au derrière, réclamez des chroniques dans les commentaires de ma Pile à Bloguer, et parce que c'est pour vous, je le ferai. Je l'ai d'ailleurs déjà fait

  • Coming out

    Voilà, c'est décidé, en concertation avec moi-même, me, myself and I, je sors du placard, je fais mon coming out, bref : JE ME GEOCALISE !

    J'habite en région lyonnaise, et j'aime ça.

  • I did it !

    Enig Marcheur.gif

    Deux mois.

    C'est le temps qu'il m'a fallu pour lire Enig Marcheur, de Russel Hoban. Deux mois de sacerdoce, excepté une pause éclair (enfin... 4 tomes quand même !) dans le monde décalé de Cail Garriger. C'est pourquoi ce livre fait l'objet de ma première chronique littéraire de l'année, et c'est bien la moindre des choses.

    Voici le quatrième de couverture : « Dans un futur lointain, après que les feux nucléaires ont ravagé le monde - le Grand Boum -, ce qui reste des hommes est revenu à l'âge de fer, leur survie sans cesse mise en péril par des chiens mangeurs d'homme et des clans rivaux. La gnorance, la preuh et les superstitions ont pris le pouvoir. La langue n'est désormais plus qu'un patois menaçant et vif dans lequel subsistent par fragments les connaissances du passé. 

    C'est là qu'Enig Marcheur, douze ans, va prendre la décision inédite de coucher par écrit ses aventures hors normes à la poursuite de la vérité en revenant sur les pas des hommes à l'origine du Sale Temps. »


    Un mot d'abord de l'objet livre. N'étant pas particulièrement bibliophile, je parle rarement de ce genre de chose, mais le soin apporté par l'éditeur, Monsieur Toussaint Louverture, à la couverture du roman vaut le détour. Elle est constituée de quatre parties :

    • la couverture cartonnée propre, dans les tons jaunes et blancs,
    • une première jaquette cartonnée ajourée représentant les loups/chiens en rouge,
    • une deuxième jaquette cartonnée ajourée représentant le Ptitome Bryllant en noir par dessus,
    • enfin, une jaquette en PVC transparent pour protéger le tout.

    Un véritable tour de force, et un travail d'artiste.

    La particularité d'Enig Marcheur est qu'il est écrit en parlénigm, une langue déconstruite qui se veut l'héritière de la nôtre, déformée et remaniée après des millénaires d'oralité.

    Un roman post apocalyptique, donc, qui donne la parole à un jeune garçon arrivant à l'âge d'homme - 12 ans ! - ayant décidé de coucher par écrit ses mémoires, chose que personne ne fait à son époque. Enig est le petit bout de la lorgnette par lequel le lecteur part à la découverte de la société dans laquelle il évolue, une société éclatée en minuscules entités, fermes et chantiers nomades, autour de feu la ville de Canterbury, désormais nommée Cambry. A 2500 d'ici, on ne reconnait plus rien, si ce n'est les noms des anciennes autoroutes...

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    Mauvais souvenir de Julian, avec un narrateur naïf.


    Principes de dualité et d'unité souvent évoqués, bizarre dans la bouche d'un môme.

    Mythe détourné de Saint Eustache. marionettistes, représentants du pouvoir. histoire d’Eusa et d’Adom le Ptitome Bryllant.

    Transmission du savoir et de l'expérience, répétition des erreurs du passé.

    Provenance : saint-eustache.org

    Lu aussi par : Nebal (chronique rédigée en parlénigm !), Gromovar, Sandrine, chroniqué mais pas fini chez Lune


     

     

    Enig Marcheur est un roman post apocalyptique, donc, qui donne la parole à un jeune garçon arrivant à l'âge d'homme - 12 ans ! - ayant décidé de coucher par écrit ses mémoires, chose que personne ne fait à son époque. Enig vit une sorte de quête initiatique. Il est le petit bout de la lorgnette par lequel le lecteur part à la découverte de la société dans laquelle il évolue, une société éclatée en minuscules entités, fermes et chantiers nomades, menacée par des chiens sauvages mangeurs d'hommes, autour de feu la ville de Canterbury, désormais nommée Cambry. A 2500 d'ici, on ne reconnait plus rien, si ce n'est les noms des anciennes autoroutes... 

    La particularité d'Enig Marcheur est qu'il est écrit en parlénigm (riddleyspeak), une langue déconstruite qui se veut l'héritière de la nôtre, déformée et remaniée après des millénaires d'oralité. Le roman étant réputé intraduisible en raison de cette langue si particulière, on ne peut que saluer le travail de titan du traducteur Nicolas Richard - et le pari insensé de la maison d'édition pour avoir commandé ce travail.

    Ce langage constitue le fond du roman, peut-être encore plus que la forme. De toute façon, l'influence de la forme sur le fond est ici une évidence. La pensée a évolué avec le langage, et tous deux forment une entité nouvelle, pas facile à appréhender ni sur le fonds ni par la forme. Le glossaire de fin ne m'a pas éclairé d'un iota sur le sens des termes qu'on y trouve.

    Les croyances communes de la société d'Enig sont constituées d'un mélange de légendes pseudo-chrétiennes, reprenant et déformant l'histoire de Saint Eustache ayant trouvé la foi en voyant un cerf portant une croix entre ses bois, et de réminiscences de la culture scientifique qui fait aujourd'hui notre quotidien : la physique, la chimie, l'atome.

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     Source : saint-eustache.org

    On se retrouve donc avec l'histoire d'Eusa, qui au coeur de la Feurrée a découvert Adom le Ptitome Bryllant entre les bois d'un cerf et l'a déchiré en deux, puis provoqué le Grand Boum et enfin payé ses méfaits le restant de sa vie. Sa légende est colportée par les représentants du Ministère, des marionettistes qui passent de fermes en campements porter la bonne parole.

    L'une des scènes les plus fascinantes est le commentaire par l'un des protagonistes d'un texte ancien, écrit dans "notre" langue, relatant l'histoire de Saint-Eustache. L'interprétation qui en est faite est à nos yeux déroutante, absurde... et crédible.

    La recherche du symbolique dans le quotidien est omniprésente dans la pensée d'Enig et de ses contemporains. Les principes de dualité et d'unicité sont au coeur de leurs réflexions : 

    Je le sentais dans mes tripes et dans mon bide. Tu essaies de faire qu'un avec quelque chose ou quelqu'un mais tu auras beau essayer la dualité de toute chose travaille contre toi jusqu'au bout. Tu essaies t'attraper l'unicité et elle se sépare en deux dans tes mains. (p. 189, traduit du parlénigm par mes soins)

    Les cheminements intellectuels menées par Enig ou ses camarades m'ont parfois laissé les yeux écarquillés et le cerveau en panne : qu'ont-ils voulu dire ? De quoi parlent-ils ?  Il faut dire que la langue obscurcit la compréhension que nous pouvons avoir du sens. Cela ajouté à mon désintérêt avoué pour la philo, je me suis sentie stupide plus souvent que je ne l'aurais souhaité...

    Ce qui est évident en revanche à la lecture de l'oeuvre, c'est l'importance accordée à la transmission du savoir et de l'histoire, afin d'éviter les erreurs du passé. Chaque spectacle de marionnettiste sur l'histoire d'Eusa donne lieu à une séance d'interprétation/transe censée éclairer un aspect de celle-ci. Une fascinante déclinaison de l'oralité comme unique mode de transmission.

     

    Alors ? Qu'ai-je pensé d'Enig Marcheur ?

    Avant tout, c'est un texte qui marque, pour le meilleur ou pour le pire. Sa forme est si originale qu'on ne peut l'oublier en passant au livre suivant.

    J'ai eu quelques appréhensions au début du roman, car j'ai un mauvais souvenir de Julian, de Robert Charles Wilson, en raison de son narrateur naïf dont la vision partiale et partielle m'avait beaucoup agacée. Heureusement pour moi, si Enig se rapproche d'Adam de part son statut très jeune homme débutant, là s'arrête la comparaison. Enig est jeune, mais il est pas aussi naïf. Il a dans les grandes lignes le même niveau de connaissance et d'éducation que ses compagnons plus âgés.

    En revanche, le fait qu'un enfant puisse évoquer des principes philosophiques, telle la dualité citée plus haut, m'a perturbé. Ce n'est pas un discours que j'attends de la part d'un enfant, pas même, rapporté à notre époque, d'un adolescent accédant à l'âge d'homme. Ou alors je n'ai fréquenté que des imbéciles, mais tout de même. En cela, j'ai trouvé le postulat un peu capillotracté, même si le contenu était intéressant.

    Mon Libraire (avec les majuscules) m'avait promis que ce roman n'était pas si difficile à lire, du moment qu'on se le lisait à voix haute dans la tête. Il n'avait pas tort, à partir du moment où on a suffisamment de temps de lecture devant soi pour pouvoir passer en mode "lecture intérieure à voix haute". Ce temps, je ne l'ai jamais. C'est bien là que le bât blesse ! Enig Marcheur reste difficile à lire, car même une fois pris le pli de la lecture, le contenu nous est souvent étranger, donc délicat à appréhender.

    Je n'ai rien d'une masochiste en lecture, et de plus, je déteste par dessus tout les livres qui privilégient systématiquement le style au détriment du fond. Enig Marcheur aurait donc dû me déplaire dès la première page, d'autant plus qu'il m'a fallu très, très longtemps pour arriver au bout.  Je garderai, comme Gromovar, un arrière-goût de "tout ça pour ça", une petite déception au vu du manque d'ambition de l'univers décrit, car on n'en sait jamais plus qu'Enig sur le monde dans lequel il vit, on manque de perspective. C'est frustrant.

    Pourtant, j'ai trouvé ce roman intéressant, même captivant, et j'ai vécu une véritable expérience de lecture. Cela dit, je ne le conseillerai qu'à des lecteurs expérimentés n'ayant pas froid aux yeux - et ayant du temps devant eux !

     

    Edition : Monsieur Toussaint Louverture, 2012

    Lu aussi par : Nebal (chronique rédigée en parlénigm !), Gromovar, Sandrine, chroniqué mais pas fini chez Lune