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Imaginaire - Page 3

  • Justice League, de Zack Snyder

    Justice-League-pourquoi-Warner-DC-ne-doit-pas-se-planter.jpgSynopsis : Après avoir retrouvé foi en l'humanité, Bruce Wayne, inspiré par l'altruisme de Superman, sollicite l'aide de sa nouvelle alliée, Diana Prince, pour affronter un ennemi plus redoutable que jamais. Ensemble, Batman et Wonder Woman ne tardent pas à recruter une équipe de méta-humains pour faire face à cette menace inédite. Pourtant, malgré la force que représente cette ligue de héros sans précédent – Batman, Wonder Woman, Aquaman, Cyborg et Flash –, il est peut-être déjà trop tard pour sauver la planète d'une attaque apocalyptique…

     

    Mon avis :  Aaah. Justice League. Un film DC Comics qui fait du Marvel. Comme me le disait récemment Tom, mon jeune collègue (par extension, oui, je suis vieille), le problème c'est que le film a été commencé par un réalisateur de DC Comics (Zack Snyder) et a été fini par un réalisateur de Marvel (Joss Whedon). Snyder a abandonné suite à un drame personnel, et Whedon s'est occupé de la fin du tournage, du montage et de la post-production. Les deux réalisateurs sont plutôt bons dans leurs parties, si on aime les films de superhéros.

    Mais ça ne marche pas. Les films DC Comics font dans le premier degré, ils sont sombres, rarement comiques. Un parti pris qui plaît ou non, mais là n'est pas mon propos. C'est que vouloir à tout prix intégrer la légèreté, le second degré et la bouffonnerie issus des Marvel dans ce monde de demi-teintes grises constitue une erreur. Les interventions clownesques de Flash dans une histoire aux accents de tragédie grecque (ou atlante, comme on veut) sont des plus déplacées. J'en ai réellement été gênée durant la projection.

    Tout n'est pourtant pas à jeter : la prestation de Gal Gadot en Diana Prince/Wonderwoman me garde sous son charme, cette femme a du charisme ; je continue à aimer Ben Affleck en Bruce Wayne/Batman, que je trouve particulièrement savoureux - Dieu sait pourtant que son personnage n'est guère aimable. J'ai apprécié les introductions des personnages d'Aquaman et Cyborg. La relation de Cyborg ave son père est fort bien amenée, une belle intimité père-fils est établie. Pour ce qui est d'Aquaman... Grosso modo, mon analyse se résume à  : « Raaah  ! Jason Momoa / Khal Drogo à demi nu, plein de tatouages et de longs cheveux sauvages... Raaaaah ! Un bain d'eau glacée, viiiiiite ! ». Ce qui ne constitue en rien une réflexion constructive, admettons-le.

    La réplique la plus drôle du film est hélas déflorée par la bande annonce : Flash à Bruce Wayne " C'est quoi ton super-pouvoir, au fait ?" Bruce Wayne : "Je suis riche."

    Le récit finit par être plat : un super méchant qui va détruire le monde, les super héros qui se liguent pour le contrer, un déjà vu qui commence à peser. Bien entendu, la question du rôle de Superman là dedans apporte un peu de piment, vu qu'il est mort, tout de même. Du moins au départ. M'enfin, une fois cet arc narratif résolu, on s'ennuie. On passe un moment à regarder de beaux effets spéciaux, de beaux muscles (pour celleux qui apprécient), un ou deux passages où les personnages nous touchent, et puis, on attend la fin.

    Donc, hélas, bien que je n'ai pas boudé mon plaisir durant la projection, je crains que Justice league ne laisse rien de très intéressant dans ma mémoire... Mais j'attends le film d'Aquaman avec un peu d'impatience (pour des raisons que tous ceux qui ont lu cette chronique comprendront sans peine).

     

  • Valérian et la cité des mille planètes, de Luc Besson

    395704.jpgGenre : space opera coloré

     

    Synopsis : Au 28ème siècle, Valérian et Laureline forment une équipe d'agents spatio-temporels chargés de maintenir l'ordre dans les territoires humains. Mandaté par le Ministre de la Défense, le duo part en mission sur l’extraordinaire cité intergalactique Alpha - une métropole en constante expansion où des espèces venues de l'univers tout entier ont convergé au fil des siècles pour partager leurs connaissances, leur savoir-faire et leur culture. Un mystère se cache au cœur d'Alpha, une force obscure qui menace l'existence paisible de la Cité des Mille Planètes. Valérian et Laureline vont devoir engager une course contre la montre pour identifier la terrible menace et sauvegarder non seulement Alpha, mais l'avenir de l'univers. 

     

    Mon avis : Luc Besson sait réaliser des films. Les imaginer, les tourner, les monter. Et en plus, il adore, en SF, si on s'en réfère à ses deux space-operas (Le Cinquième Élément et Valérian), les univers très colorés. Donc, moi, j'aime quand Luc Besson fait un space-opera.

    Évidemment, c'est du Besson. Donc on a une réalisation virtuose, franchement réjouissante, sur une histoire un peu creuse mais enlevée, directement inspirée de deux des albums des créateurs de la BD éponyme, et dont les personnages font preuve d'une maturité qui s'élève au niveau d'un lycéen de seconde. Environ.

    La scène d'exposition est assez drôle, avec l'ajout successif des peuplades à l'ISS et sa transformation en cité des mille planètes, avec quelques clins d’œils sympathiques à des références bessoniennes ou extérieures. Mais ensuite, il faut passer la trop longue scène de destruction de la planète Mül : les très grandes filles longilignes qui dansent en s'étirant et souriant bêtement pendant 20 minutes, ça me gave. On entre ensuite dans le vif du sujet : la mission confiée à Valérian et Laureline, qui permet de passer au rythme du film d'action.

    Dane DeHaan et Cara Delevingne incarnent les rôles-titres, de façon aussi convaincante que possible, vu la faible complexité des personnages. J'ai vu ici et là des critiques virulentes contre le côté falot et pusillanime de Dane DeHaan, mais pour le coup, je trouve que c'est justement là ce qui est intéressant : le film porte son nom, mais il ne porte pas seul le film. Et d'ailleurs, le personnage original de la BD est sacrément bêta. Pas idiot, mais immature. Donc, Valérian par Dane DeHaan, c'est pas mal du tout, je trouve. Il a de jolis yeux et un beau sourire. Il est amusant. Pour une fois, le héros est mignon et compétent mais inconséquent. Il ne brille pas par son épaisseur. Ce n'est pas grave, ça arrive tout le temps au cinéma, d'avoir de tels personnages ; c'est juste qu'en général, il s'agit des personnages secondaires... ou des personnages féminins principaux.

    Le film est donc au moins autant porté, on l'aura compris, par Laureline / Cara Delevingne. Une fille. Jeune, sexy, engagée, avec un caractère affirmé et de la suite dans les idées. Vous pouvez remplacer par « un mec jeune, avec de belles tablettes de chocolat et des pectoraux, engagé, avec un caractère affirmé et de la suite dans les idées », et vous avez un pitch classique des films de SF/action/aventures. Rien de nouveau sous le soleil, donc, si ce n'est qu'on a changé le sexe du protagoniste. Laureline est un peu plus intéressante que son partenaire.

    Je trouve donc très dommageable qu'à la fin du film, *alerte spoiler !* Laureline succombe au charme de Valérian. Comprenez-moi : on sait depuis le début du film que Valérian convoite sa partenaire. Il tient le rôle classique du dragueur impénitent, ce qui agace Laureline. La transformer en poupée presque romantique à la fin du film est donc maladroit et absolument pas crédible. Il aurait été plus logique soit qu'elle le renvoie gentiment dans ses vingt-deux, en attendant qu'il évolue (dans les prochains films ?), soit qu'elle consente avec plus d'amusement et de distance - et non qu'elle succombe comme une potiche.

    Le personnage joué par Rihanna, plein de promesses lors de la scène d'introduction, est maladroitement approfondi par le scénario afin que le spectateur s'y attache en un temps record. Cela ne marche pas du tout. Dommage pour elle.

    Cela posé, parlons de ce qui est pleinement réussi dans le film : une réalisation échevelée, un univers visuel ultra coloré, des scènes d'action étourdissantes - au sens propre. Il fallait le voir au cinéma pour en profiter. Peut-être même en 3D, mais en 2D, ça passait très bien. Je ne parle pas du scénario, qui contient des trous plutôt visibles, mais bien de ce que le spectateur voit. Et ça envoie. C'était très beau, très enthousiasmant, et malheureusement, assez vain. Dommage que le film manque autant d'épaisseur, il est passé à ça de devenir culte.

    Valérian et la cité des mille planètes est ce qu'il annonce être, un blockbuster divertissant : on peut être déçu, mais il n'y a pas vraiment de promesses non tenues. J'ai fait avec, et j'ai apprécié.

     

    Cette chronique aurait dû rentrer dans le Summer Star Wars de Lhisbei et M. Lhisbei, mais j'ai trois siècles de retard. Et trois millénaires d'avance pour l'épisode de l'été prochain...

     

  • Mort aux grands, de Pierre Léauté

    images.jpgGenre : uchronie ubuesque

     

    Résumé : 1919. La Première Guerre mondiale s’achève enfin et la France doit reconnaître sa défaite face à l’Allemagne. Humiliée, ruinée, la population vit désormais sous le joug du grand Kaiser. Des cendres de la défaite va cependant s’élever un homme qui ne se résigne pas : le soldat Augustin Petit !

    Lui seul a compris les raisons de la déroute. Lui seul en connaît les responsables. Lui seul a le courage de les désigner : les grands ! Voici poindre la terrible revanche du plus patriote des rase-moquettes. Vive les petits bruns !

     

    Mon avis : « Ah, vous avez fait des études d'histoire ? Alors, vous verrez, ça devrait vous plaire.... » : tels furent les mots prononcés par l'auteur à mon intention alors qu'aux Intergalactiques 2016 à Lyon je rendais visite au stand de son éditeur, Le Peuple de Mü. Pour y voir Emmanuel Quentin - mais on le sait, la vie est faite de rencontres.

    Donc, un an plus tard, je tire Mort aux grands de ma PAL et je le lis. Un court roman, d'aucuns diraient une novella, qui raconte l'histoire d'Augustin Petit, poilu patriote et revanchard. Car dans ce récit, la France a perdu la première guerre mondiale face à l'Allemagne. Augustin Petit refuse cette défaite, cherche et trouve les responsables de cette débâcle : les grands.

    Voici donc un roman féroce et drôle, et qui m'a paru fort salutaire. Plutôt pamphlet politique et social que roman, d'ailleurs, il dénonce la bêtise humaine et les ravages auxquels l'ignorance et la haine peuvent mener. Augustin Petit est le Hitler à la française, qui part en guerre contre les grands comme l'autre était parti en guerre contre les juifs. C'est évident, mais que c'est bien construit ! Pertinent, très documenté (Pierre Léauté est prof, dans la-vraie-vie-qui-fait-gagner-des-sous : ça aide), malin : on se prend un camouflet. Et on est content de l'avoir reçu !

    Par ailleurs, Mort aux grands est écrit dans un très joli français, volontairement ampoulé pour la mise en contexte, qui se révèle un vrai plaisir de lecture.

    Je te recommande donc ce livre, ami lecteur, pour sa pertinence et sa drôlerie, qui nous rappelle combien il est important pour les peuples d'avoir de la mémoire et un minimum de culture générale. Sinon, ils se retrouvent avec des pays dirigés par des Augustin Petit - ou des milliardaires à mèche.

     

    Edition : Mü éditions,  2015

  • Où s'imposent les silences, d'Emmanuel Quentin

    CVT_Ou-simposent-les-silences_2681.jpg

    Genre : gymkhana entre les mondes

     

    Résumé : D’où que vous veniez, quelle que soit votre Terre d’origine, êtes-vous sûr de vouloir lire les lignes qui suivent ? De vous entendre résumer une histoire en quelques mots sous prétexte qu’ils vous éclaireraient sur son contenu ? Voulez-vous vraiment savoir ce que recèlent ces pages ? Sachez donc que vous allez partir à la rencontre d’un étudiant confronté à un tableau de la Renaissance pour le moins anachronique, d’un flic enquêtant sur un cadavre improbable, et d’une femme amnésique se réveillant dans un champ désolé. Trois personnes rattrapées par le déséquilibre des mondes. Si votre Loi vous y autorise, ouvrez ce livre, avant que ne s’imposent les silences.

     

    Mon avis : L'auteur m'avait prévenue : « Blop, tu devrais aimer celui-ci plus que le précédent ! ». Et il avait raison. Là où le genre fantastique associé au thriller ne m'attirait guère dans Dormeurs, la science-fiction à suspens d'Où s'imposent les silences me plaît.

     Ce roman au si beau titre et à la couverture splendide (de Pascal Casolari) se lit vite. Trop vite, en fait.

    L'auteur m'avait aussi dit : « tu vas voir, j'ai travaillé le personnage féminin, tu m'en diras des nouvelles ! ». Effectivement, LA femme du récit (oui, parce qu'en fait, il n'y en a guère d'autre... Pourquoi tous les autres personnages principaux sont-ils des hommes ? Hein, Manu, pourquoi ? Je sais, tu vas dire que je ne suis jamais contente...), lorsqu'on comprend ce qu'elle est et d'où elle vient, est un personnage intéressant, résilient et redoutable. Et encore ne fait-on que deviner les traits de sa personnalité en creux : il y a beaucoup plus derrière que ce que l'auteur en dit.

    La flopée de personnages principaux (c'est un vrai roman choral) est réussie, ils sont attachants, mais leur contextualisation est trop brève -  à l'exception de Dimitri - pour les voir véritablement évoluer durant le récit. On a envie d'en savoir plus, parce que le récit de leurs mésaventures est prenant et addictif. En fait, je crois que ce roman m'a frustrée parce qu'il m'a plu. Oui, ma vie de lectrice est compliquée...

    Mais sinon, quid de l'histoire ? Matthias, Alex Jovic et LA femme : trois personnages initiaux pour trois récits distincts se superposent, dans deux univers différents. Puis trois. Puis quatre. La force d'une narration bien menée, c'est de ne pas perdre ses lecteurs dans une construction aussi éclatée. Ici, pas de problème : on rentre dans le livre, on accompagne les personnages, et on n'a pas la moindre envie de les lâcher. Page-turner accompli, voici un roman qui assume sa fonction divertissante tout en distillant quelques problématiques contemporaines.

    L'univers "normal" de Matthias et Alex se déroule sur une terre, qui dans moins de 20 ans, est dévastée par une épidémie. LA femme se retrouve dans un univers immobile, où elle est véritablement engluée. Et puis, il y a les autres, Dimitri en tête, qui proviennent d'une terre alternative victime des menées conquérantes de la « République » de Falmur, qui asservit politiquement et psychologiquement les peuples conquis, afin de faire prévaloir la puissance et l'absolue dictature de la Loi (falmurienne). La Loi a toujours raison, et il est bon de le faire savoir au monde entier. Et mêmes aux autres (mondes), tant qu'à faire.

    Les silences dont il est question dans ce titre poétique sont ceux imposés par la Loi, qui ne tolère pas d'autres langues, pas d'autres voix que la sienne. Bien que le contexte politique ne soit pas suffisamment développé à mon goût, le roman propose des pistes qui tournent autour de la défaite de la démocratie, et du virage réactionnaire et obscurantiste qu'elle prend en période de crise des valeurs. Un rappel utile en ces temps troublés, où les libertés fondamentales se désagrègent peu à peu, et ce, sous notre nez.

    Le portrait d'un violeur est tout aussi impressionnant et pertinent quant à l'intégration inconsciente de la culture du viol par les individus. Une thématique anti-sexiste qui ne pouvait que me plaire.

    Je peux par ailleurs évoquer les différences de tonalité d'écriture qui caractérisent le personnage en scène dans le chapitre, et qui rendent le récit d'autant plus vivant.

    Ces aspects, et bien d'autres encore, sont abordés dans Où s'imposent les silences. Ils témoignent d'une belle largesse de spectre. Tout cela est d'autant pus frustrant que le roman est court. J'en suis à rêver qu'Emmanuel Quentin produise des romans-fleuve à la Brandon Sanderson, imaginez un peu !

     

    Merci donc, Emmanuel, pour ce chouette roman. J'ai beaucoup apprécié ce moment de lecture. Je ne l'ai d'ailleurs pas sitôt terminé qu'il est passé de l'autre côté du lit, sur la table de chevet de M. Blop. Il m'en dira des nouvelles...

     

    édition : Le Peuple de Mü, 2017

  • L'alliance (La Saga Vorkosigan, tome 18), de Lois McMaster Bujold

    71V4t6nBDhL.jpgGenre : « Ivan, espèce de crétin ! »

     

    Résumé : Lorsqu'il est affecté à la protection discrète et rapprochée d'une jeune représentante du beau sexe sous l'un des dômes de Komarr, le capitaine Ivan Xav Vorpatril, plus connu sous le nom de Cousin Ivan, s'applique à sa tâche avec zèle, quoique sans la moindre discrétion. Il se trouve qu'en réalité, fille d'une des plus puissantes familles de l'Ensemble de Jackson, Nanja Brindis fuit les tueurs qui ont décimé son clan. Mais Komarr n'est pas sûr, et Ivan parvient vite à la conclusion qu'il leur faut gagner Vorbarr Sultana, la capitale de l'empire, pour mettre à l'abri la jeune femme dont la vie ne tient qu'à un fil.
    Un fil... ou un anneau ?  

     

    Mon avis : je ne pouvais évidemment pas laisser passer un Summer Star Wars sans parler d'une de mes séries chouchoutes de space opera, la Saga Vorkosigan. Surtout quand j'ai lu de nouveaux tomes dans l'année.

    Voici donc, pour la première fois, un roman réservé à Ivan Vorpatril, le crétin magnifique, cousin de Miles Vorkosigan. Ivan est un personnage fétiche de la saga, parce qu'il incarne sans aucun doute tout ce que Miles aurait dû être si sa mère n'avait pas été empoisonnée à la soltoxine durant sa grossesse. Au fur et à mesure des 17 précédents tomes de la saga, on apprend à découvrir Ivan. Ivan est intelligent, mais il dissimule son intelligence sous une épaisse couche de fainéantise - qu'il ne cache, elle,  surtout pas. Ivan est léger, ce qui le fait paraître superficiel. Ivan n'est jamais réellement ce qu'il paraît être, même aux yeux de Miles. L'incipit reprend l'exclamation la plus courante qu'on trouve dans la bouche de Miles quand il parle à son cousin - plus exactement, quand il vocifère à son intention. Le gimmick est tel qu'il en est devenu une private joke entre un chauffagiste adepte de SF et moi, au boulot, c'est vous dire. Mais, pardon, je m'égare.

    Avoir tout un tome pour Ivan Vorpatril est donc, de fait, une très bonne nouvelle. Parce que l'avantage avec lui, c'est qu'il ne nous déçoit jamais : il fait gaffe sur bévue, tout en maintenant un cap logique et bien plus subtil qu'on pourrait le croire à ses actions. On rit, beaucoup pour ma part. On est surpris, aussi, et c'est sans doute l'une des grandes qualités du personnage : lorsque sa nature réelle se dévoile, on découvre chez lui des motivations profondes insoupçonnées.

    Ce roman permet également au lecteur de voir Ivan Vorpatril déployer sa connaissance infinie - on peut, à ce point, parler d'érudition -  de la société barrayarane en général, et de la caste Vor en particulier (les Vor étant les nobles de la planète Barrayar). Nous découvrons à quel point les jeux de pouvoir n'ont aucun secret pour lui, et que la raison de l'acquisition de ces savoirs a été une des plus cruelles leçons de sa vie. Sa lucidité sur sa condition est parfois effarante, surtout comparée à l'image qu'il donne de lui. Le roman révèle également à quel point les qualités d'Ivan Vorpatril sont extrêmement utiles, voire nécessaires, dans le cadre de son obscur emploi de secrétaire particulier d'un haut-gradé de l'armée. Et finalement, on comprend les raisons pour lesquelles il se réfugie dans le rôle d'un personnage inoffensif et passe-partout.

    Bien entendu, les clés du personnage Ivan sont dévoilées au cours d'un récit à suspens, mêlant humour, action et coups de théâtre, ainsi que Loïs McMaster Bujold sait fort bien le faire. On se doute évidemment comment se terminera l'histoire dès son début, mais il n'en reste pas moins que le chemin est, comme toujours dans cette Saga, éminemment plaisant. Rien que de l'évoquer ici, quelques temps après ma lecture, je suis joie.

    Cher lectrice·teur, je t'enjoins donc à entamer cette saga, si possible par le titre Cordelia Vorkosigan, afin de connaître toi aussi cette félicité.

     

    Ce billet constitue ma huitième et ultime participation à la huitième saison du Summer Star Wars de M. Lhisbei, porté par Lhisbei et Excel Vador, bénis soient leurs noms dans toutes les galaxies connues et inconnues.

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    PS : oui Lhisbei, tu peux m'inscrire d'office pour l'été prochain. ;)

     

  • Dragon déchu, de Peter F. Hamilton

    1206-10ans-dechu_org.jpgGenre : le capitalisme ultra-libéral appliqué au space opera.

     

    Résumé : Lawrence Newton, en ce XXIVe siècle, n'a qu'un désir, une ambition, sillonner l'espace galactique. Même s'il doit abandonner famille, fortune et pouvoir pour accéder à ce rêve. Vingt ans plus tard, alors qu'il est devenu un simple sergent pour le compte d'une des Grandes Compagnies, il lui semble avoir échoué sur toute la ligne. Mais sur la planète Thallspring, où Lawrence et ses hommes sont chargés d'appuyer un " retour sur investissement ", c'est-à-dire un pillage pur et simple, une légende persistante évoque le Temple du Dragon Déchu. Ce Dragon Déchu, s'il existe, serait un extraterrestre à la puissance colossale. Et Lawrence entreprend de monter, à l'insu de ses employeurs, sa propre petite expédition. Non sans risques. 

     

    Mon avis : le résumé ci-dessus, très linéaire, ne rend pas hommage à la complexité de la construction de ce long roman de space opera, qui introduit de multiples personnages et de nombreux flash-back. Les personnages évoluent, et notre point de vue sur eux également, tout au long du roman. Ils peuvent être à la fois sympathiques et antipathiques, simples et complexes, engagés et cyniques. Les révélations progressives au long du récit font apparaître des motivations et des actes incompris au départ. Rien que pour les personnages, donc, Dragon déchu vaut le coup d'oeil.

    Mais il a bien d'autres atouts dans sa manche, le moindre n'étant pas, comme indiqué en incipit, le capitalisme ultra-libéral appliqué au space opera. Reprenant les codes du genre, Peter F. Hamilton le « met au goût du jour », ce qui d'un point de vue philosophique n'est pas, à mon sens, une bonne chose, mais est, d'un point de vue littéraire, tout à fait intéressant. La conquête spatiale a bien eu lieu, mais en cette fin de 24e siècle, les coûts sont bien trop importants et l'exploration a cessé, faute d'argent. Au temps pour les rêves de l'âge d'or...

    Les très grandes entreprises encore impliquées dans les voyages spatiaux ont un mal fou à faire du bénéfice. En fait, elles n'y parviennent pas avec le simple coût du billet. Les actionnaires ne s'y retrouvent pas. Pour compenser, les armées privées de ces entreprises mènent depuis des dizaines d'années des opérations de pillage en règle des colonies établies grâce à leurs vaisseaux. Opérations menées avec un cynisme qui fait froid dans le dos, qui permettent de récupérer des objets manufacturés, des minerais, de l'artisanat local : tout ce qui peut avoir une valeur aux yeux des actionnaires.

    C'est à travers l'oeil du sergent des forces d'intervention (entendez : de pillage) de l’entreprise Zantiu-Braun, Lawrence Newton, qu'on découvre les planètes colonisées par les humains. Et c'est à travers l'oeil d'un habitante de Thallspring, Denise Ebourn, qu'on découvre l'autre camp, celui des colons en colère. Or, tous deux disposent d'un super-logiciel nommé Apogée, logiciel qui permet à la résistance de Thallspring de mener à bien ses actions de sape sans laisser de trace. Il est donc d'autant plus surprenant que le sergent Newton le détienne aussi. Ce logiciel de pirate, ultra-puissant, proviendrait d'une légende... Dommage que cette légende ne soit évoquée qu'aux trois-quarts du roman.

    Pour les adeptes de space opera militaire, enfin, Dragon déchu propose une version intéressante des armures de combats, des sortes de combinaisons-scaphandres irriguées par le propre sang des soldats, et intégrant une belle panoplie d'armements.

    Dragon déchu fut donc pour moi une intéressante découverte et constitua un agréable voyage. L'approche matérialiste et terre-à-terre de l'exploration spatiale y est développée de façon remarquable, même si le roman ne fait pas l'économie de quelques longueurs. Je recommande.

     

    Ce billet constitue ma septième participation à la huitième saison du Summer Star Wars de M. Lhisbei, porté par Lhisbei et Excel Vador, bénis soient leurs noms dans toutes les galaxies connues et inconnues.

    space opera,science-fiction

  • Phobos (tomes 1 à 3), de Victor Dixen

    space opera,science-fictionRésumé : SIX PRÉTENDANTES. SIX PRÉTENDANTS. SIX MINUTES POUR SE RENCONTRER. L’ÉTERNITÉ POUR S'AIMER.

    ILS VEULENT MARQUER L'HISTOIRE AVEC UN GRAND H.
    Ils sont six filles et six garçons, dans les deux compartiments séparés d'un même vaisseau spatial. Ils ont six minutes chaque semaine pour se séduire et se choisir, sous l’œil des caméras embarquées. Ils sont les prétendants du programme Genesis, l'émission de speed-dating la plus folle de l'Histoire, destinée à créer la première colonie humaine sur Mars.

    ELLE VEUT TROUVER L'AMOUR AVEC UN GRAND A.
    Léonor, orpheline de dix-huit ans, est l'une des six élues. Elle a signé pour la gloire. Elle a signé pour l'amour. Elle a signé pour un aller sans retour...

    MÊME SI LE RÊVE VIRE AU CAUCHEMAR, IL EST TROP TARD POUR REGRETTER.

    Mon avis : Phobos est une trilogie de littérature pour adolescents. Elle a pour but de dénoncer les dérives 1) de la téléréalité, 2) du capitalisme sauvage, 3) des politiques opportunistes et réactionnaires. Cela est clair comme de l'eau de roche. Quand on le lit quatrième de couverture en étant un adulte, on se dit que cela manque quand même un peu de finesse, mais soit : puisqu'il y a en plus une thématique d'exploration spatiale, pourquoi pas ?

    space opera,science-fictionJ'ai lu les trois tomes. Je m'y suis obligée, pour évaluer l'ensemble de l'oeuvre. Comme cela se lisait vite, mes yeux n'ont pas trop pleuré.

    Pas trop. Mais quand même.

    En réalité, je ne serai pas injuste avec l'oeuvre de cet auteur de 38 ans. Ses idées sont bonnes : utiliser le premier voyage habité et la première colonisation humaine sur Mars pour en faire une émission de téléréalité, c'est une anticipation intéressante. Il y a, bien sûr, l'exercice obligatoire des relations sentimentales compliquées des jeunes voyageurs entre eux, et puis le complot sous-jacent au projet global. Sans cela, point de piment. J'applaudis. Plus encore quand le héros de l'histoire est une héroïne, et que les personnages masculins et féminins sont à égalité en termes d'importance. Les contraintes spatio-temporelles sont respectées, avec les délais de latence grandissant entre le vaisseau et la Terre, des délais exploités dans le récit pour faire avancer l'intrigue. L'auteur est en prise directe avec la culture adolescente, cela se sent dans la caractérisation de ses personnages.

    space opera,science-fictionMais bon, la subtilité, c'est quand même utile, hein, dans la vie. Ne serait-ce que pour que le lecteur ne se sente pas pris pour un imbécile.

    Donc, le problème de la trilogie Phobos, c'est qu'elle a la subtilité d'une petite cuillère (comme dirait Hermione de Ron dans Harry Potter). Voire celle d'un marteau sur du cristal. Tous les personnages sont des caricatures. Tous. C'est infernal. De la directrice de programme manipulatrice aux ados explorateurs, c'est un festival de clichés. Des traits de caractère forcés, des situations personnelles proprement incroyables (en particulier la fille de Serena McBee et leur relation...) : franchement, c'était trop.

    Sans oublier les effets d'annonce publicitaire et les formules choc qui ponctuent le récit : on ne peut pas oublier qu'on est dans une téléréalité, et c'est franchement lourd au bout de 30 pages. Alors imaginez trois tomes de slogans...

    Tout cela est délibéré, mais je ne suis pas certaine qu'un lecteur adolescent ait besoin de cette masse compacte et indigeste pour entendre le propos (les fameux trois points du début). Donc, Phobos a de bonnes idées qui sont mal mises en valeur. Pour le coup, je pense qu'une adaptation en série télé serait plus réussie et plus intéressante.

    A découvrir si vous n'avez rien de plus urgent à lire.

     

    Ce billet constitue ma sixième participation à la huitième saison du Summer Star Wars de M. Lhisbei, porté par Lhisbei et Excel Vador, bénis soient leurs noms dans toutes les galaxies connues et inconnues.

     

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