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Sense8, de Lana Wachowski, Lilly Wachowski et J. Michael Straczynski

carte.jpgL'histoire : partout dans le monde, des hommes et des femmes prennent conscience qu'ils voient, entendent et ressentent des choses qu'ils ne devraient pas voir, entendre ou ressentir. Et ces personnes comprennent progressivement qu'elles ne sont pas folles, mais qu'elles sont connectées à d'autres personnes, de parfaits inconnus, qui vivent à des milliers de kilomètres de chez eux. Une coréenne, une indienne, une islandaise, un allemand, un kenyan, un mexicain et deux américains vivent chacun dans leur pays mais vivent et sentent ce qui se passe chez les huit autres. Ce sont des sensitifs.

Mon avis : J'ai mis du temps à regarder cette série de Netflix. Pour les 12 épisodes, il m'a fallu presque deux mois. Pourquoi ? Pour la raison que vous retrouvez partout sur le net dans les articles critiquant Sense8 : le début est très lent. Extrêmement lent. Et en plus, il est quasi incompréhensible. Mais on s'accroche car on sent comme une promesse. On prie très fort pour ne pas être une nouvelle fois déçu par les Wacho... Et la promesse est tenue !

D'abord, la mise en scène : certains personnages prennent "possession" du corps d'un autre pour un court instant, en général dans un moment de crise, ce qui nécessite un jeu de caméra diablement malin. Il parvient à escamoter un acteur au profit de l'autre de façon totalement invisible pour le spectateur. C'est très bien fait et carrément jouissif pour celui qui regarde.

Ensuite, la nuance. La subtilité. La complexité. La valeur du non-dit. Toutes ces choses que l'on trouve habituellement très difficilement dans les productions à destination du public américain sont ici déployées avec intelligence et avec une grande sensibilité. Les personnages partagent leurs émotions avec leurs alter ego, et ce partage est un pur moment de magie, chaque fois qu'il se produit.

Rien n'est ce qu'il paraît au premier abord, et chacun des huit sensitifs possède une personnalité profonde, complexe, parfois contradictoire. Bref, ils sont humains, au lieu d'être des outils au service d'un scénario. Ils ne sont pas démonstratifs, ils se contentent d'être. Leurs émotions sont aussi visibles que leurs actes ; les liens qu'ils tissent entre eux et avec leurs proches prennent une intensité parfois sidérante. Vous avez vu ou verrez sur le web des évocations de la scène de sexe, qui est l'une des illustrations de cette sidération que l'on ressent parfois dans Sense8.

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Enfin, l'altérité est bien évidemment au coeur du propos de Sense8 : l'autre est différent, il est de culture, de sexe, de langue, de genre, de sexualité différente de la mienne, mais pendant quelques secondes, il est moi - et je suis lui. Cette coexistence littérale induit une expérience intime de l'autre, de sa façon d'être, de penser, de se comporter, de bouger. Elle amène le personnage, et de là, celui qui le regarde (moi, la spectatrice) à accepter ce qu'il voit. Il n'y a pas de latitude, de recul suffisant pour laisser à l'analyse, ni, a fortiori, au préjugé, le temps de s'installer. On se prend l'autre en pleine face. On fait avec. Et on en conclut qu'on y survit sans vraiment de mal. C'est une des meilleures leçons que j'aie jamais reçue sur l'acceptation de l'autre.

Sense8 a révélé une chose : c'est que les Wacho sont fait pour le format série, et non pour le format cinéma (un article d'Allociné évoque la question). Ils ont tellement de choses à raconter que leurs films finissent toujours par être à la limite du ridicule, ou mauvais, ou alors, s'ils sont assez bons, ils font un four. Matrix est l'exception qui confirme cette malheureuse règle.

 

Sense8 est mon gros coup de coeur en série télé pour l'année 2015. Je vous la recommande, avec un conseil en prime : soyez patient, ne cherchez pas à comprendre. Vous ne l'apprécierez que mieux.

Le feu vert a été donné aux soeurs Wachowski (oui, cette fois, les deux ont changé de sexe) et J. Michael Straczynski pour une deuxième saison. Espérons qu'elle me procure autant de plaisir que la première...

Commentaires

  • Une très belle série que j'ai également beaucoup aimé. Je mets juste un petit bémol sur le côté un peu trop "utile" de certains personnages (la pauvre coréenne qui est parfois un peu réduite à venir sauver la mise lors de la moindre baston xD)

  • C'est marrant, je ne l'ai pas considérée ainsi. Évidemment, ses interventions sont providentielles, mais son goût pour le combat et le fait qu'elle soit plus souvent qu'à son tour privée de liberté d'expression dans son quotidien en Corée justifient pour moi largement ses interventions. Mais c'est peut-être parce que je kiffe ses combats... Zéro objectivité ! :-D

  • Une série remarquable, très emblématique des Wachowski (comme ça, pas de souci de genre :p)

  • Toutafé ! J'aimerais la faire découvrir à mes proches, pour les valeurs humaines qu'elle porte, mais la plupart n'ont pas Netflix et ne sont pas habitués au format série...
    Et bien d'accord avec toi : ça fait longtemps qu'on les appelle les Wachowski.

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