Pour ceux qui seraient passé à côté l'an dernier, Cail Garriger est une auteure américaine fascinée par ses ancêtres grands-bretons. Elle a écrit une pentalogie intitulée Le protectorat de l'ombrelle dont vous trouverez ici ma chronique enthousiaste.
Apprenant que la dame avait remis le couvert, dans le même univers que la précédente série, j'ai sauté sur le premier tome. Que j'ai lu en 24 heures, journée de travail comprise (non, je ne lisais pas pendant mes heures de travail. Juste à la pause de midi).
Bon. Je vous le résume rapidement : Sophronia est une petite demoiselle de 14 ans, qui fait le désespoir de sa mère. Elle préfère grimper aux arbres et se cacher dans les monte-plats plutôt qu'apprendre les bonnes manières. Or, dans l'Angleterre victorienne, les bonnes manières sont indispensables. La maman envoie donc sa progéniture dans un très sélect pensionnat pour jeunes filles. Pensionnat qui se révèle fort intéressant pour Sophronia, car son enseignement, bien qu'il comprenne - et à haute dose - l'apprentissage des bonnes manières, propose également des cours tels que le sport, le combat, la manipulation, la collecte d'information (doux nom pour l'espionnage) et l'assassinat.
Orbit continue à proposer des couvertures d'un goût particulier, que certains pourraient qualifier de douteux. Bien que celle-ci soit à mon sens plus réussie que celles (réunies) des 5 tomes du Protectorat de l'ombrelle. Mais on partait de loin.
Cail Garriger insère dans cette nouvelle série les éléments contextuels qui faisaient le charme du Protectorat de l'ombrelle : l'époque victorienne, les froufrous de la mode à triple jupons, les exigences plaisamment ridicules de l'étiquette, et les êtres surnaturels. Et, oui, n'oublions pas : un personnage féminin qui dépote et se démène dans un univers sexiste (sans pour autant être suffragette, notez bien).
Hélas, trois fois hélas, le charme s'arrête là. Le scénario est rebattu : une ado un peu à part qui découvre une école à son goût et se fait très vite des amis et des ennemis ? Harry Potter. Des aventures dont la chute coïncide étonnamment bien avec les vacances scolaires ? Mmm... Harry Potter. Une héroïne qui dissimule la vérité sur son école à sa famille ? Attendez voir... Ah, oui ! Harry Potter.
Bref, zéro inventivité. De la littérature de divertissement adulte un peu originale dans la première série, nous sommes passés ici à une littérature ado réchauffée. Le fait que le public ciblé soit plus jeune me déçoit un petit peu, mais en réalité, c'est le « réchauffé » qui me dérange. Quel dommage de perdre ainsi sa saveur !
Et encore, je ne vous ai pas parlé du pire...
Le pire, c'est la langue. Pour une raison non élucidée, Cail Garriger a "simplifié" son écriture, perdant en élégance et en mordant ce qu'elle pensait peut-être gagner en clarté, proposant des mélanges improbables de niveau de langage, dans lesquels les anachronismes deviennent indigestes - alors qu'ils apportaient une touche humoristique dans le Protectorat de l'ombrelle. Je ne sais pas comment Sylvie Denis s'y est prise pour faire cette traduction, mais je ne l'envie pas.
Au nom de quoi avoir appauvri la langue ? Parce que le coeur de cible est adolescent ? Mais puisque c'est un lectorat que l'esthétique steampunk attire, il devrait être parfaitement capable, à 14 ans, de s'adapter à une langue un peu soutenue ! Ou comment prendre, une fois encore, les ados pour des imbéciles...
Je suis tout de même curieuse de voir comment va évoluer la série. Le prochain tome, intitulé Corsets & Complots, sortira en septembre. Peut-être enverra-t-il la série sur une orbite un peu plus haute. Je l'espère. Parce qu'en attendant, je ne peux vous conseiller qu'une chose : allez donc lire le Protectorat de l'ombrelle.
Genre : steampunk, fantastique
Edition : Orbit, 2014. Disponible également en format numérique.
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Ce billet s'inscrit dans le cadre du challenge SFFF au féminin, lancé par Tigger Lilly, du Dragon Galactique. [Edit du 17 juin 2014].